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26 juin 2012 2 26 /06 /juin /2012 13:53

  Chirico

 Mystère et mélancolie d'une rue, Giorgio de Chirico, 1914

 

Rembarquement dans ma mémoire

De ma plage du Nord native

Sous le sable et le vent barbare

Petite enfant à la dérive

 

Dans la classe aux fenêtres closes

Sur les cahiers à l'encre bleue

Stagne sans fin le temps morose

Quand on attend d'être amoureux

 

Dans les pages de l'étudiant

Guillaume à la tête étoilée

A mon oreille va pleurant

Les errances du Mal-Aimé

 

Je chante les revenez-y

Qui ne reviendront plus jamais

Voyageurs en poésie

 

Pour Le Défi de la Semaine n° 84,

Thème proposé par ABC : faire le tour de soi-même en 80 mots  

 

 

 

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21 juin 2012 4 21 /06 /juin /2012 22:37

 

 anna-en-jaune-la_co.jpg

Anna de Noailles, 1913

 

 

C’est l’été, je meurs, c’est l’été…

Un désir indéfinissable

Est sur l’univers arrêté.

Ah ! dans les plis légers du sable

Le tendre groupe projeté

D’un rosier blanc et d’un érable !

Le cœur languit de volupté ;

On croit qu’on sourit, mais on pleure.

Le désir est illimité…

- O belle heure de l’été, belle heure

Brisée en deux par les parfums,

Plaintive, ardente, et qui demeures

Un arceau de miel rose et brun,

Que dois-je faire de l’ivresse

Qui m’exalte au-delà de moi ?

O belle fleur qui nous caresses

Par les fleurs du plus chaud des mois,

Entraîne mon corps qui défaille

Vers quelque douce véranda

Que protège un store de paille,

Vert comme un nouveau réséda ;

Que là je trouve un enfant tendre,

Un ami triste comme moi,

Auprès de qui j’irai m’étendre

Et jeter mon divin émoi ;

Et les bras mêlés sur la table

Où luira le traînant soleil,

Dans un sanglot inexplicable

Nous aurons un plaisir pareil…

 

"Vie-Joie-Lumière" in Les Eblouissements

 

En ce jeudi 21 juin 2012, premier jour de l’été, où  la chaleur fut accablante, mêlée d’une humidité séchée par le grand vent, j’ai souhaité faire entendre la voix d’Anna de Noailles, celle qui voulait « pour amant le tendre été ».

Dans cette suite de vingt-neuf octosyllabes en vers croisés, elle exprime un sentiment d’exacerbation douloureuse, créée par  un désir diffus et innommé. S’y opposent les champs lexicaux du plaisir («  désir » (vers 2 et 9), « volupté »,  « ardente », « l’ivresse », « m’exalte », « caresses », « défaille », « émoi », « plaisir ») et de la souffrance (« je meurs », « on pleure », « brisée », « plaintive », "triste » "sanglot »).

J’aime chez elle cette manière qu’elle a de s’adresser à la nature avec spontanéité et simplicité, pour dire un sentiment complexe, qui serait un spleen ensoleillé. On notera l’apostrophe, « O belle heure de l’été », reprise dans une anaphore qui insiste sur ce moment de beauté privilégié (vers 10), que vient conforter la variation phonique : « O belle fleur ».

Tout son être est ici sollicité : le cœur bien sûr (vers 7) mais aussi est surtout le corps. Les parfums deviennent couleurs ( "un rosier blanc", « un arceau de miel rose et brun »), les images l’entraînent dans une ex-tase intense qui la projette hors d’elle-même( « projeté », « au-delà de moi ») et qu’elle souhaite partager.

Dans ce moment unique, comme pétrifié (« arrêté », « demeures »), dans le temps d’un été à son plein, la poétesse ardente et passionnée aspire à la rencontre avec « un enfant tendre », « un ami triste », (deux caractéristiques soulignées par l’allitération en [t]), qui la comprendrait. A l’abri d’un store couleur de réséda, sous un soleil atténué (« traînant »), la tendresse (vers 5 et 22) et la douceur (vers 19) s’exprimeraient dans une communion sensuelle qui ferait s’unir leurs bras et pleurer sans raison leur âme.

Dans ce poème tout plein de vibrations indéfinies, d’une acuité inquiète, au cœur même de l’éblouissant été, on perçoit cette angoisse qui hante Anna de Noailles. C'est elle qui donne à toute son œuvre ce frémissement lyrique inimitable, venu peut-être de ses origines orientales.

 


 

 

 

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19 juin 2012 2 19 /06 /juin /2012 22:31


 garcin.jpg

Jérôme Garcin  au milieu des chevaux

(Photo Vincent Josse, 2011, Radio-France)

 

Vendredi 15 juin 2012, au Jardin des Plantes de Saumur, l’écrivain et journaliste Jérôme Garcin était l’hôte de La Maison des Littératures, qu’anime la poétesse Albane Gellé. Depuis 2008, il est en effet le parrain de cette association qui promeut romanciers et poètes.

Dans la présentation de son invité, Albane Gellé a rappelé le parcours d’un écrivain aux multiples facettes qui, depuis son premier récit autobiographique, La Chute de cheval (1998), ne cesse de « creuser l’intime ». Selon elle, il serait vain de vouloir classifier une œuvre dans laquelle le roman se fait document, l’essai, roman ou l’entretien, récit. Ce que cherche surtout Jérôme Garcin, l’écrivain cavalier, c’est à « se rassembler » comme on le fait à cheval. Il s’agit pour lui de « tirer un fil », de redonner vie à des oubliés, en écrivant des livres qui sont à la fois hommage et remerciement.

Mais dans cette vie très remplie, qui se partage entre journalisme et écriture, comment Jérôme Garcin concilie-t-il le temps éphémère de l’actualité et un temps plus durable dont il faudrait retrouver la qualité ?

En remerciant Albane Gellé de sa présentation exhaustive, l’auteur d’Olivier a reconnu assumer sa schizophrénie.  Il est bien conscient du paradoxe qu’il y a à courir sans cesse après l’actualité pendant quatre jours et demi, pour ensuite disparaître pendant deux jours et demi en Normandie, pour passer d’une vie horizontale à une vie verticale, celle du cavalier qu’il est. Mais pour lui, monter et écrire sont deux activités inséparables, indissociables depuis l’écriture de La Chute de cheval. Il en est convaincu, sans les chevaux, il n’aurait jamais écrit. S’il existe une impudeur à parler de soi, c’est bien le cheval qui l’a pourtant autorisé à le faire. Et il évoque cette première fois où, après avoir fait une balade à cheval, il se mit à recopier ce qu’il avait écrit dans sa tête pendant sa promenade. Ainsi la selle est devenue son divan  et « c’est fou ce qu’on peut se raconter sur le dos d’un cheval » !

S’il s’autorise ainsi à se confier au cheval, c’est parce que le cheval est l’animal qui l’a privé de son père de quarante-cinq ans alors que lui en avait dix-sept. Et pourtant, longtemps, il a considéré le cheval comme un voleur et s’en est tenu farouchement éloigné. Il affirme à présent que monter et écrire sont deux choses très proches. Quand on a trouvé la phrase juste, on ne voit plus le travail qu’elle a demandé et c’est la même chose en équitation. Jérôme Garcin avoue d’ailleurs qu’il a presque failli « basculer » et tout abandonner pour les chevaux. Dorénavant, il est cependant parvenu à trouver un équilibre précaire dans ses multiples activités.

Ne doit-il pas en effet lutter contre la folie de cette accélération du temps journalistique qui oblige à tout vivre en temps réel et à pratiquer au Masque et la Plume le contraire de ce pourquoi lui-même écrit ? Il sait que le public de ces « jeux du cirque » n’attend qu’une chose : que les critiques s’y transforment en « monstres carnivores », et disent le plus de mal possible des œuvres. Si c’est amusant à faire, c’est cruel. Auteur lui-même, il  vit mal cette situation. Pourtant il reconnaît que ce jeu permanent, cette comédie, a l’Histoire pour elle. En dépit de tout, on le sent en effet fier et heureux de travailler depuis vingt-cinq ans pour cette émission créée en 1955, qui possède le plus grand studio de France-Inter et qui est la plus vieille émission en Europe.

Puis Jérôme Garcin évoquera avec la pudeur qui le caractérise la publication tardive de son dernier récit autobiographique, Olivier (2011), qui remémore la mort de son frère jumeau à l’âge de six ans. En écrivant, sans plaisir, précise-t-il, cette œuvre douloureuse, il a tenté de répondre à des questions qu’il ne s’était jamais posé. Quand on perd son frère jumeau, devient-on un jumeau amputé ?  Quelle est la part de culpabilité ? Il a compris soudain que sa passion pour le cheval lui rendait les quatre jambes de la gémellité perdue. Et s’il est aussi boulimique d’activités, n’est-ce point parce qu’il travaille désormais pour deux ? Une façon toute personnelle de trouver un équilibre à sa vie.

Olivier paraîtra en Folio en septembre 2012 et l’auteur a accepté de faire figurer une photo de son frère disparu sur la première de couverture. Jérôme Garcin lit alors la très belle postface qu’il a rédigée pour cette nouvelle parution. La mort de son frère, de celui qui était « [s]on secret », explique son « goût fétichiste pour les années soixante », sa peur qu’on lui manque. Il y revendique d’être jugé sur « ce qu’on fait et non sur ce qu’on est ». S’il a écrit ce livre sur Olivier « [sa]force et [sa] faiblesse », c’est par crainte qu’on ne l’oublie l’âge venant. Dans ce « mélange de douleur et de bonheur », il éprouve le « devoir de désigner l’invisible ». L’écriture des deux prénoms, Olivier et Jérôme, a restitué intact le couple qu’il formait avec son frère. Et « l’attendrissant sourire » de leur mère lui a parlé de son frère. Quant au rosier de juillet 1962, planté sur la tombe de son jumeau, il s’étonne de sa stupéfiante vitalité.

Jérôme Garcin aura vécu six ans avec son frère et plus d’un demi-siècle sans lui. Ils auront aussi vécu neuf mois ensemble, de cette vie intra-utérine dont parle la psycho-thérapeuthe allemande, Bettina Austermann. C’est elle qui a fait part de cette découverte étonnante de l’observation d’un fœtus de jumeau mettant le bras autour de son frère, alors que le cœur de celui-ci est en train de cesser de battre.

Sur le bureau de l’écrivain, deux photos : celle de son père à cheval, une autre de son frère prise devant Notre-Dame. Depuis, lui dit-il, « tu ne m’a jamais quitté ».

A Albane Gellé qui lui demande quels sont ses « prochains galops arrière » en écriture, Jérôme Garcin répond qu’après Olivier, il a du mal à reprendre quelque chose. Quand on a écrit « ça », y-a-t-il autre chose à dire ? Pourtant il a repris son bâton de pèlerin littéraire avec un nouveau roman, celui qu’il est en train d’écrire sur Jean de la Ville de Mirmont, jeune Bordelais ami de Mauriac, mort au Chemin des Dames. Il s’emploie ainsi à le réinventer.

C’est déjà ce qu’il avait fait lorsqu’il avait écrit sur Héraut de Séchelles, dans C’était tous les jours tempête. Il avait beaucoup aimé écrire sur cet avocat et ami de Louis XVI, cas exemplaire de palinodie politique qui, à la Révolution, avait participé au Comité de Salut public et était lui-même mort guillotiné. Au bourreau, qui avait voulu le séparer de Danton au moment ultime, il avait lancé : « Bourreau, tu n’empêcheras pas nos têtes de s’embrasser dans le même panier ! » Il avait réinventé à sa manière la brève vie de ce cynique et il se demande encore comment il a pu se mettre « dans la peau d’un type pareil » !

Puis Jérôme Garcin a récidivé ce genre d’entreprise avec Etienne Beudant (1886-1949), le grand théoricien de l’art équestre, personnage bouleversant et d’un caractère très au-dessus de la moyenne. Dans L’écuyer mirobolant, Il a conservé son parcours, de Saumur au Maroc en passant par l’Algérie, et son retour brisé à Dax, le corps en charpie. Les deux versants d’un vie, dont la seconde moitié de son existence sur une chaise roulante.

Jérôme Garcin évoque ici le texte magnifique de Beudant, arrêtant de monter et confiant sa jument Vallerine dont il se sépare pour jamais. Véritable vademecum qui précise comment il faut s’en occuper, comme si elle était un être humain. On sait que cette jument, mise dans un pré près de la Loire pendant l’exode de 1940, disparut sans laisser de traces. Le privilège du romancier est de lui prêter une seconde existence en lui faisant rencontrer un jeune cavalier du nom de Philippe.

L’écrivain explique comment il a réinventé ce personnage (qui avait assisté à un spectacle de Buffalo Bill), en imaginant pour lui une rencontre avec Calamity Jane. Il a aussi imaginé une amitié (hautement improbable dans la réalité) avec le maréchal Lyautey.

Jérôme Garcin lit alors le chapitre 14 de son roman L’écuyer mirobolant (Dax, 12 janvier 1949) qui raconte la mort d’Etienne Beudant. Admirable passage dans lequel le superbe cavalier d’autrefois « psalmodie » les vers du Madrid de Musset et évoque son passé devant son vieux palefrenier René. Par un matin de janvier, le serviteur fidèle retrouvera son maître mort dans son fauteuil roulant, « dans une position qu’il ne lui avait jamais vue, un peu faraude, ridicule, impudique, inhumaine », une badine dans la main droite, une rêne de bride dans la gauche, deux éperons portugais accrochés à ses « charentaises informes ». « Il venait de faire sa dernière reprise. Une de ses plus belles reprises, docteur… », dit René au médecin qu’il appelle pour venir constater le décès.

Quelqu’un demande ensuite à Jérôme Garcin pourquoi il écrit. Il répond que, pour lui, l’idée de transmission est capitale. Il a toujours écrit avec l’idée de transmettre (Théâtre intime, 2003, par exemple). Dans cette démarche personnelle et égoïste, dit-il, il a voulu raconter  à ses trois enfants qui est leur mère, Anne-Marie Philipe, la fille de Gérard et Anne Philipe. Leur dire les combats qu’elle a menés pour monter à son tour sur scène, leur révéler ce que certains ont besoin de savoir pour continuer à vivre.

Il y a sans doute aussi dans la démarche d’écrire le souci de se décharger un peu, de faire le clair avec soi-même. On croit qu’on peut vivre sans exprimer ce que l’on a en soi et Jérôme Garcin, après notamment la mort de son père, avoue avoir été psycho-rigide et avoir longtemps intériorisé ses sentiments. Dans le silence, il dit avoir toujours envié « le culot des comédiens qui se racontent ». Il s’étonne d’ailleurs d’avoir attendu si tard pour raconter oralement la scène de l’accident de son jumeau. N’est-ce pas en effet plus confortable de ne pas se poser de questions ?

Jérôme Garcin a bien conscience qu’il écrit surtout sur des « vies arrêtées ». Son premier livre en 1994, Pour Jean Prévost, évoquait Jean Prévost, cet écrivain de l’entre-deux guerres, fou de Stendhal. Parti en 1942 pour le Vercors, devenu le capitaine Goderville dans la Résistance, il continua à écrire. Mitraillé par les Allemands lors de la chute du maquis en 1944, il écrivait encore sur Baudelaire.

L’admirateur de Jean Prévost considère que « beaucoup de destins pleins sont brefs », une équation certes puérile qui ne vaut que pour lui mais qui est en parfaite adéquation avec le destin fracassé de Gérard Philipe. Et après la mortelle chute de cheval de son père, Jérôme Garcin avait retrouvé les derniers mots d’une étude qu’il rédigeait sur Charles Péguy. Ils évoquaient ce « Charles Péguy qui rêvait d’une mort bien fauchée ».

Pour l’écrivain, « tout tourne autour de ce sentiment de précarité ». Et il a bien conscience qu’en le reportant sur les siens, il génère ainsi un état d’angoisse illégitime, pas toujours très sain. Et lorsque son fils a eu six ans, il s’est étonné de ce miracle. Son père étant mort à quarante-cinq ans, lorsqu’il a eu le même âge, un jour, à cheval, il a éprouvé trois minutes d’effroi intense. « Je devenais le père de mon père », dit-il.

A une auditrice qui lui demande si ce sentiment proche de la pathologie n’est pas trop lourd à porter, l’écrivain reconnaît que son épouse Anne-Marie Philipe a « le pouvoir inouï d’avancer sans regarder en arrière ». Cavalière elle aussi, elle va de l’avant et lui a rendu une légèreté à laquelle il n’était pas disposé, lui dont « le passé colle aux bottes ».

Puis quelqu’un lui demande encore si passer du silence absolu à la publication n’est pas passer d’un extrême à l’autre. Il répond qu’en écrivant Olivier, il a toujours eu la conviction qu’il irait jusqu’au bout. Il s’est bien sûr demandé si publier ce récit n’était pas une manière d’abîmer le souvenir de son jumeau,  si cela ne représentait pas une forme de vulgarité ou d’outrecuidance. Mais il a en fait compris que, dans une famille où l’on considère qu’on ne se raconte pas, cela faisait partie de son auto-thérapie, et que c’était un processus dont il avait besoin.

A cette occasion, il a reçu de nombreux témoignages de lecteurs et son frère Olivier est ainsi devenu « le petit ami de gens qu’ [il ne conna[ît] pas ». Il s’agit là d’un processus de mort et de résurrection qui préserve le bonheur des vivants tout en percevant la présence des morts.

Une auditrice rapproche ensuite son récit de celui d’Annie Ernaux, L’autre fille. Jérôme Garcin reconnaît une forme de parenté entre les deux ouvrages, tout en faisant remarquer qu’Annie Ernaux n’a jamais connu sa sœur disparue alors que lui a vécu six ans avec son frère. Il affirme que, dans les deux cas, l’écriture est cicatrisation de la douleur et qu’elle est toujours une forme de réparation.

Enfin on évoque Boris Cyrulnik et le processus de résilience. Jérôme Garcin cite la belle phrase de Hölderlin : « L’art et la philosophie, c’est l’hôpital des âmes blessées. » Il précise par ailleurs que les livres dont il parle dans son récit, Olivier, font partie de sa vie et qu’il les a lus alors qu’il avait dix-sept, dix-huit ans. Il n’a pas lu de livres spécialement pour l’écrire. Ce n’est qu’après notamment qu’il a lu Le Syndrome du Jumeau perdu d’Alfred R. et Bettina Austermann.

Pour terminer la soirée, il souhaite que quelqu’un lui pose une dernière question, mais plus gaie. On lui demande de parler de ses liens avec la chanteuse Barbara (Barbara, Claire de nuit, 1999). Il raconte alors les circonstances de leur rencontre, lors d’une de ses dernières tournées en 1990, au festival de Ramatuelle. Elle était en répétition par 35° au milieu du chant des cigales, tandis que Jérôme Garcin se trouvait dans la coulisse avec son jeune fils Gabriel. Celui-ci lui a échappé et, se plantant devant le micro, a demandé à la chanteuse pourquoi elle était toujours en noir. Après lui avoir dit : « Tu me vois, habillée en rose ? », elle a confié le petit garçon  à son chauffeur en le chargeant de lui acheter un cadeau. De retour de Saint-Tropez avec un polaroïd, il a photographié Barbara, elle qui détestait cela. Le soir, elle a dédié son récital au petit garçon rencontré l’après-midi. C’est de là qu’est née une amitié triangulaire entre Barbara, Gabriel et Jérôme Garcin. La chanteuse, qui n’avait jamais eu d’enfant, a ainsi noué une amitié merveilleuse avec ce petit garçon avec qui elle mangeait des pots de bébé dans sa loge après le spectacle. « Elle avait adopté le père en même temps », ajoute avec humour Jérôme Garcin, à qui elle téléphonait presque quotidiennement. L’écrivain garde un souvenir impérissable de cette femme, souvent portraiturée en veuve, qui était en fait très drôle : « On riait beaucoup » avec elle. Et il se rappelle comme elle était « sublimement bouleversante » quand elle chantait, même quand sa voix commença à la quitter.

C’est sur cette évocation de la « grande dame brune » que s’est terminé cet entretien avec Jérôme Garcin, l’écrivain cavalier, qui a ensuite dédicacé ses livres, en dégustant une coupe de Méthode champenoise.

 

 

Lire ma critique d'Olivierlink

 

 

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18 juin 2012 1 18 /06 /juin /2012 17:04

 le-violon-georges-braque.jpg

Le violon, Juan Gris

 

Le contre ut de trop

La voix qui déraille

La corde brisée

 

Un couac amoureux !

 

Textoésie envoyé le 17 juin à 06h 50,

en écho à celui de  Suzâme du 16 juin à 17h10

link

 

 


 

 

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18 juin 2012 1 18 /06 /juin /2012 14:48

 Avant-la-nuit-bassin.JPG

      La fontaine du bassin de Rou (Photo ex-libris.over-blog.com)

 

 

Le jardin vibre et bruit sans trouble et sans alarme

Ni vacarme

 

Le liseron s’enlace aux tiges de lavande

Bleuissantes

avant la nuit lavande

Les lavandes avant la floraison)

(Photo ex-libris.over-blog.com)

Les abeilles bourdonnent au dessus du bassin

Italien

Avant la nuit abeille

Abeille sur un nénuphar du bassin de Rou (Photo ex-libris.over-blog.com)

Par delà les toits gris les nuages explosent

En rose

Avant la nuit

La girouette des voisins sur le ciel rose du soir  (Photo ex-libris.over-blog.com)

Les oisillons pépient au creux des trous du mur

Obscurs

Les grenouilles coassent aux bords de l’étang

Palpitant

Un avion strie le bleu d’un très long trait

Couperet

 Avant la nuit avion

Avion dans le ciel du soir (Photo ex-libris.over-blog.com)

Sur le jardin serein la nuit tendra sa palme

Si calme

 

 

Jeudi 14 juin 2012, après le dîner

 


 

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14 juin 2012 4 14 /06 /juin /2012 07:00

 Queneau.JPG

      Mer, rochers et algues, entre Kerouriec et La Roche Sèche en Erdeven

(Photo ex-libris.over-blog.com, janvier 2012)

 

 

 

Clochard nocturne aux yeux taillés

tu te traînes sur les rocs maritimes

laissant laiteuse la trace de ton passage bavé

les eaux noires continuent de rouler leurs airs

toi libre de respirer tu évites

les hommes couchés derrière leurs murailles

en haut de la falaise somnole un douanier

et lorsque la nuit se dissout tu repars

vers le nid d’algues où tu es né

 

Fendre les flots (1969),

in Courir les rues, Battre la campagne, Fendre les flots

Raymond Queneau

 

Queneau présentait ainsi la troisième partie de son recueil : « La vie est une navigation, on le sait depuis Homère. » Dans la préface de l’édition Gallimard, Claude Debon souligne que Fendre les flots est, des trois volumes, le plus « pensé », le plus construit.

Brève apostrophe à l’être humain, ce neuvain me semble bien résumer cette idée d’un homme, éternel voyageur, qui aspire à sortir de ses limites pour retourner vers les eaux originelles d’où il est issu.

Dans ce texte à l’apparence simplissime, subtile association de prosaïsme et de philosophie, on perçoit une grande profondeur. L’homme y apparaît sous la très belle métaphore d’un « clochard nocturne aux yeux taillés». Une image complexe qui associe la péjoration de l’appellation « clochard » à la beauté de l’errance, qui mêle aussi la noirceur de la nuit à la pénétration de ces yeux « taillés », peut-être comme des gemmes.

S’opposent ici les champs lexicaux de l’immobilité, du minéral, de l’enfermement (« rocs », « couchés », « murailles », « falaise », « douanier ») et de l’errance (« clochard », « maritimes », « rouler », « libre », « passage » « repars » « algues »).

Par le biais d’un lexique péjoratif ( « tu te traînes », « bavé »), d'une allitération en [t] des plus insistantes sur l’aspect lent et rampant (vers 1, 2 et 3), les premiers vers dessinent un être à la lenteur d’escargot, mollusque portant sa maison sur son dos, bavant une laitance qui écoeure.  En face de lui, la mer éternelle (« continuent ») est en proie à un mouvement infini, que vient souligner l’emploi des consonnes liquides.

Avec l’évocation ironique d’un « douanier » qui « somnole », fonctionnaire installé dans la monotonie des jours, la seconde partie du poème souligne ce désir fondamental de l’homme à sortir de ses frontières, à s’arracher à l’immobilité, à la prison de la terre. Il n’a de cesse de retourner vers la matrice originelle, son élément primordial d’où il a été exilé, « le nid d’algues » de la naissance. L’assonance stridente en [i] (« libre », « évites », « respirer », « nuit », « dissout », « nid ») est au service de cette inspiration extrême (aspiration), qui précède le départ au loin.

L’ensemble baigne dans une atmosphère cosmique obscure (« nocturne », « eaux noires », « la nuit »), que le mouvement vers l’ailleurs vient dissiper (« se dissout ») et anéantir. Ce poème dynamique (« tu repars ») philosophe sans en avoir l'air, tout comme Heiddeger lorsqu'il écrivait que « L’homme est l’être des lointains. »

 

Pour le Jeudi en Poésie des Croqueurs de Mots,

Thème : prendre l’air

 

 

 

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12 juin 2012 2 12 /06 /juin /2012 09:37

 Anges-1.JPG

Deux anges porteurs des instruments de la Passion, Chapelle du château de Chavigny à Lerné (37)

(Photo ex-libris.over-blog.com, Jeudi 07 juin 2012)

 

Dans la chapelle blanche éblouie de lumière

De beaux adolescents souriants et pensifs

Porteurs des instruments  d’une Passion mystère

Suspendus dans l’instant  tendre et contemplatif

Patientent que revienne le Christ trinitaire

 

Anges-2.JPG

 Ange porteur de l'échelle de la Descente de Croix, Chapelle du château de Chavigny à Lerné (37)

(Photo ex-libris.over-blog.com, Jeudi 07 juin 2012)

 

 

Pour la communauté de Hauteclaire, Entre Ombre et Lumière,

Thème proposé par Reine-Claude : les anges

 

 

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12 juin 2012 2 12 /06 /juin /2012 07:13

Ecorce-bouleau.JPG

 Bouleaux sous la neige

(Photo ex-libris.over-blog.com (Effet zoom focal et effet Lomo), 10 février 2012)

 

 

 

Prendre un jour le Transsibérien

Rouler dans une nuit de suie

Sous le cahot des astres

Dans le matin paralytique

L’âme entravée et les doigts gourds

S’accouder à la vitre qui tremble

Et surprendre dans un éclair épileptique

Sur la plaine en lignes de fuite

« Avec le cœur du ciel

L’écorce du bouleau »

 

Pour Papier Libre de Juliette,

Sur deux vers de Robert Desnos :

« Avec le cœur du ciel/ L’écorce du bouleau »

 

Ecorce-du-bouleau-2.JPG

 Ecorce de bouleau

(Photo ex-libris.over-blog.com (Effet Lomo), 31 janvier 2010)

 

 

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11 juin 2012 1 11 /06 /juin /2012 07:05

 Carabe

Carabe doré, dit jardinière ou vinaigrier, dans le jardin de Rou

(Photo ex-libris.over-blog.com, début juin 2012)

 

Au soleil de juin

Sur le gras lavandin

 

Mandibules dressées

J’ai vu comme un éclair

Un carabe doré

Bijou aux reflets verts

 

Dans son écrin de ciel

Bague au doigt de Cybèle

 

Dans le jardin, début juin 2012

 

 

 


 

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8 juin 2012 5 08 /06 /juin /2012 10:35

Meditation.JPG

Pleine lune entre les branches à Rou 

(Photo ex-libris.over-blog.com, 06  mai 2012)

 

L’énergie de la sérénité

En soi

Comme un chant silencieux

 

 

Pour lire le texte de Noune, "Méditation 9" : link

 

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Voie lactée ô soeur lumineuse

Des blancs ruisseaux de Chanaan

Et des corps blancs des amoureuses

Nageurs morts suivrons-nous d'ahan

Ton cours vers d'autres nébuleuses

 

La chanson du Mal-Aimé, Apollinaire

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