Alban Caussé et Jacques Desse, libraires à Paris ont retrouvé il y a deux ans au fond d'une caisse une trentaine de clichés d'Aden à la fin du XIX° siècle. Ils ont appartenu à Jules Suel, beau-frère de Dubar, qui engagea Rimbaud dans la factorerie dirigée par Alfred Barbey. Ils représentent des bâtiments de la ville indigène, appelés Crater par les Anglais, des vues de Steamer point, appellation du port de la ville, des photographies de l'Hôtel de l'Univers, que l'on peut encore voir de nos jours, malgré sa décrépitude et dont Suel était le propriétaire. L'on sait que Rimbaud séjourna régulièrement à Aden pendant une dizaine d'année et qu'il logea dans cet hôtel, avant d'embarquer pour les côtes africaines et de livrer des fusils à Ménélik, roi du Coa.
Une des photographies, de format 9,6 x 13,6 cm, montre sept personnes, qui ont pris la pose sur le perron de l'Hôtel de l'Univers. En comparant différentes vues de Steamer point, Jean-Jacques Lefrère et Jacques Desse ont pu dater ce cliché entre 1880 et 1890.
Ce groupe est composé essentiellement d'Européens, dont deux sont vêtus à la mode yéménite, et d'une femme. Parmi eux, sur la droite de la photo, on remarque un homme, qui a manifestement bougé pendant la prise de vue. En effet, ses traits ne sont pas très nets mais son regard, aigu en même temps que lointain, retient l'attention.
Lefrère et Desse ont rapproché ce cliché d'autres photographies de Rimbaud et ils ont été frappés par de nombreux points communs avec les huit rares clichés que l'on possède du poète devenu aventurier. Voici les traits caractéristiques qu'ils ont retenus : l'ovale du visage, la densité des cheveux, plantés de manière particulière, avec une pointe un peu décentrée sur la droite, les pattes très fines, des oreilles similaires dans leur implantation, leur forme et leur proportion, un nez assez large entre les sourcils, la forme de l'oeil, le dessin de la paupière et celui de l'arcade sourcilière.
Ils ont remarqué encore le regard très clair, souligné par Jean Richepin, qui écrivait que le poète avait des "yeux bleus comme [il n'en avait ] vu à personne : ils étaient gênants à force d'être clairs".
Ils ont souligné le bout du nez rond et les narines un peu échancrées, les fines moustaches blondes, semblables à celles que dessina Isabelle Rimbaud et dont le vice-consul de France à Massouah dans une lettre d'août 1887 avait dit qu'elles étaient "presque blondes mais petites".
Ils ont été attentifs à la bouche très dessinée qu'Ernest Delahaye, l'ami d'enfance de Rimbaud décrivait comme "non grande mais forte, rouge, d'un dessin rude, d'une expression violente et amère, lèvres épaisses, l'inférieure surtout, et comme fendue".
Le bas du visage a retenu leur attention par son menton rond et volontaire à la fois, les renflements sur les joues de part et d'autre de la bouche, les deux bosses sous la lèvre inférieure, détails que Julien Gracq appelait "la marque de famille" des Rimbaud et qu'Isabelle sa soeur possédait aussi.
Isabelle Rimbaud, photo sur plaque de verre
L'élément déterminant de la comparaison a sans doute été la dissymétrie de la lèvre supérieure de Rimbaud, la partie gauche de celle(ci présentant un "manque", visible nettement sur la photo retrouvée.
Pour les auteurs de la trouvaille, celle-ci est d'importance puisqu'elle donne à voir avec netteté le visage de Rimbaud au début de ses aventures en Mer Rouge. Selon eux, elle serait une sorte de "chaînon manquant" entre les photos de l'adolescence et les autoportraits trop peu précis du Harar.
Elle est aussi très émouvante. En effet, sur cette photo un peu floue, Rimbaud, vêtu simplement et prêt à se lever, ne semble-t-il pas mal à l'aise, comme s'il était déjà absent au monde, "aywhere, out of the world"?
Rimbaud enfant
Rimbaud à sept ans
Frédéric et Arthur Rimbaud en communiants
Arthur Rimbaud (croix rouge), en classe de 6°
à l'Institut Rossat
Rimbaud à douze ans, par Carjat
photo parue dans La Revue Blanche en 1897
Rimbaud avec une lavallière noire
Rimbaud à dix-sept ans, été 1872,
Photo de Carjat
Buste de Rimbaud par Paterne Berrichon,
paru dans La Plume en 1900
Rimbaud en 1871
Rimbaud par F. Vallotton
Rimbaud en 1871 par Casals
Rimbaud par Paul Verlaine
Rimbaud et Verlaine marchant dans Londres
Rimbaud en juin 1872 par Paul Verlaine
Rimbaud, la pipe à la main
Rimbaud assoupi sur une chaise
Rimbaud et Verlaine par Luc-Albert Moreau
Rimbaud et Verlaine, Un coin de table, Fantin-Latour, 1872
Epilogue à la française,
Portrait du Français Arthur Rimbaud, blessé après boire
par son intime le poète français Paul Verlaine.
Sur nature par Jef Rosman
Rimbaud fumant
par Ernest Delahaye en 1875
Rimbaud assis en 1873
Rimbaud (debout à gauche) à Aden en 1880,
photo de Scheick-Otman
Autoportrait de Rimbaud au Harar
Autoportrait de Rimbaud au Harar
Autoportrait de Rimbaud au Harar
Rimbaud (assis à droite) sur le perron de l'Hôtel Univers
entre 1880 et 1890
Gros plan de Rimbaud (photo précédente)
Rimbaud par sa soeur Isabelle
Rimbaud par sa soeur Isabelle
Rimbaud mourant par sa soeur Isabelle
Sources:
Jean-Jacques Lefrère et Jacques Desse, Un coin de table à Aden.
Samedi 17 avril 2010