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25 juin 2018 1 25 /06 /juin /2018 15:27

La façade du prieuré du Breuil-Bellay

Alice Cherbonnel, alias Jean de la Brète

Je connaissais la rue Jean de la Brète à Saumur mais je ne m’étais jamais demandé qui était ce personnage ! C’est à l’occasion d’une visite guidée le samedi 16 juin 2018 au prieuré du Breuil-Bellay que j’ai découvert l’existence de la romancière Alice Cherbonnel, alias Jean de la Brète. Née à Saumur en 1858, d’une mère angevine et d’un père normand, et morte en 1945 au Breuil-Bellay, sur la commune de Cizay-la-Madeleine. L’écrivain a vécu dans cet ancien prieuré que sa famille avait transformé en maison d’habitation. Elle y écrivit une grande partie de son œuvre, composée de plus de 35 romans, dont deux furent couronnés par l’Académie française. Il s’agit notamment de Mon oncle et mon curé, qui fut adapté au théâtre en 1935 et au cinéma en 1938 par Jean Nohain. Les visiteurs pouvaient voir ce film projeté à 21 h 30. Ce roman, réédité en 1977, raconte les premiers émois amoureux d’une orpheline impertinente, prétexte à une peinture de la société de la fin du XIXe siècle.

Sophie Sassier, guide de Saumur Ville d'Art et d'Histoire, et M. de Rivière, le propriétaire du Breuil-Bellay

C’est Sophie Sassier, guide de Saumur Ville d’Art et d’Histoire, qui a conduit la visite avec le brio et le savoir impressionnant qu’on lui connaît. Elle était accompagnée par Henry de Rivière, le propriétaire des lieux, et par Anne Faucou, qui a fait des recherches sur Alice Cherbonnel. La déambulation était ainsi entrecoupée avec des textes de la romancière qui aima cette maison.

Nos guides : M. de Rivière, Sophie Sassier, Anne Faucou

Sophie Sassier a d’abord rappelé l’histoire de l’ordre de Grandmont auquel appartenait le prieuré. Cet ordre monastique fut fondé au début du XIIe siècle par les disciples de l’ermite Etienne de Muret, qui avait fondé un ermitage à Muret vers 1076, et qui fut canonisé en 1189. C’est le premier prieuré établi à Grandmont en Haute-Vienne qui donna son nom à l’ordre. Ce dernier fut doté d’une règle approuvée par le pape Adrien IV en 1156. Cette règle était fondée sur la pauvreté et la charité dans un lieu retiré du monde. La pratique exemplaire de la deuxième vertu  valut aux Grandmontains le surnom de « Bonshommes ».

La particularité de l’ordre était la cohabitation entre clercs consacrés à la prière et laïcs, dits « convers » qui géraient les maisons annexes avec un « dispensateur » à leur tête. Les clercs, quant à eux, étaient soumis à l’autorité d’un « correcteur ». Les clercs « se trouvèrent par cette institution soumis aux laïques qu’ils auraient dû gouverner entièrement suivant la pratique de tous les autres religieux », d’où les crises dans l’ordre. Les libéralités d’Henri II Plantagenêt permirent l’extension en France de l’ordre. Il s’en servit de base pour contrôler le Limousin et ses vassaux. Lui-même et ses fils participèrent à la construction des bâtiments et à l’essor de l’ordre en Aquitaine, Poitou, Anjou, Normandie, Angleterre. Aux nouvelles implantations Plantagenêt répondent les fondations du roi de France : 159 celles entre 1124 et 1274. Plus de 80 % des actes de fondation se situent entre 1189, date de la canonisation du fondateur, et 1216. A la fin du XIIIe siècle, on dénombrait plus de 140 monastères ou « celles », regroupant près de 900 clercs. En 1317, le pape Jean XXII réforma l’ordre. Le prieuré chef fut élevé en abbaye tandis qu’étaient créés 39 prieurés regroupant plusieurs des anciennes « celles ».

Soumis à la commende (on parle de ces « messieurs de Grandmont »), l’ordre périclita et nombre de « celles » furent transformées en fermes. Les Guerres de Religion furent à l’origine du déclin de l’abbaye chef d’ordre et de plusieurs prieurés et maisons annexes. Au XVIIe siècle, une tentative de réforme de « stricte observance », suscitée par le frère Charles Frémon, ne connut que peu de succès. Au milieu du XVIIIe siècle, l’ordre était très affaibli. Il devint alors la cible de la Commission des Réguliers, réunie en 1765 par Louis XV, dont le but était d’examiner l’état des communautés religieuses. L’ordre de Grandmont en fut la principale victime, à cause de la complicité de son rapporteur l’archevêque Loménie de Brienne. La bulle du pape Clément XIV (1772) ordonna la suppression de l’ordre de Grandmont et l’attribution de ses biens à l’évêché de Limoges. C’est la mort du dernier abbé, Xavier Mondain de la Maison Rouge, en 1787 qui scella définitivement la fin de l’ordre. La nouvelle abbaye de Grandmont, dont la reconstruction s’était achevée en 1768, fut détruite et ses trésors dispersés par l’évêque de Limoges, monseigneur Duplessis d’Argentré.

Réconfort de générations d’hommes par son secours spirituel ou social, le monde grandmontain révèle le pouvoir sur les hommes de cénobites, habiles gestionnaires. S’il séduit par sa règle, souvenir de son origine érémitique, il vit constamment en symbiose avec le contexte politique et économique.

Les vestiges du cloître sur les murs

Après cette présentation de l’ordre de Grandmont, les visiteurs ont pu découvrir les vestiges de l’ancien prieuré du Breuil-Bellay, devenu maison d’habitation. La forme en U du bâtiment permet de comprendre qu’il s’agit de l’ancien cloître dont la partie sud a été démolie. On peut l’imaginer en voyant sur les murs les traces des arcatures et de l’ancienne porte qui menait au dortoir des moines. C’est au sud que se trouvait l’hôtellerie. Les façades de droite et du centre présentent de nombreuses fenêtres en trompe-l’œil, peintes en gris, comme c’était la mode au XIXe siècle.

La chapelle grandmontaine du Breuil-Bellay

On a ensuite un grand choc lorsqu’on pénètre dans l’immense chapelle, située à l’ouest de cet ensemble. De l’extérieur, on ne devine guère qu’il s’agit d’une chapelle puisque le bâtiment est surmonté d’un fronton triangulaire à l’antique, qui fait pendant à la partie droite. D’une hauteur spectaculaire (mais le sol devait être bien plus haut autrefois), elle offre au regard les vestiges d’un grand retable baroque, dont on ne sait exactement s’il est de la main de Biardeau ou de Charpentier.

Eléments du retable baroque

La Vierge à l'Enfant au sommet du retable

Il est encore surplombé d’une Vierge à l’Enfant. Alors que Marie est décapitée, l'Enfant-Jésus a la tête qui penche dangereusement. De nombreux vestiges sculptés sont posés à terre.

Photo de la statue de saint Etienne qui a disparu

C’est dans cette chapelle que se trouvait une belle statue de saint Etienne, vraisemblablement saint Etienne le diacre (dit le protomartyr) et non saint Etienne de Muret, le fondateur de l’ordre. Cette sculpture, dont Sophie Sassier a fait circuler la photo, avait été mise en dépôt au musée du Mans. Par un malencontreux hasard elle a été vendue à un collectionneur et on ignore actuellement où elle se trouve.

Le second lavabo sur la façade est et le pressoir dans le fond de la nef

Le retable vu du fond de la nef

Sophie Sassier nous a fait remarquer la disposition du chœur, plus large que la nef unique, une particularité des chapelles de l’ordre de Grandmont. M. de Rivière nous a aussi montré le second lavabo dans le fond de la chapelle sur le mur est. En effet, les prêtres de l’extérieur qui venaient dans ce prieuré n’avaient pas le droit de célébrer dans le chœur. Au fond de la chapelle, on remarque un ancien pressoir, décrit par Alice Cherbonnel dans ses souvenirs. On donne des concerts dans cette chapelle où l'accoustique est excellente.

A l’ouest, où se trouve l’entrée du lieu saint, les visiteurs étaient protégés par un auvent monumental.

Anne Faucou devant l'entrée ouest de la nef

Détail du tympan du portail d'entrée

La bibliothèque de Jean de la Brète

Ensuite, M. de Rivière nous a conduits dans une sorte de corridor, dont j’ai cru comprendre qu’il avait été le cimetière des moines, devenu la bibliothèque d’Alice Cherbonnel. Ses livres ont été conservés, vestiges émouvants des lectures variées de la romancière disparue.

Le chevet de la chapelle côté nord

La façade nord du prieuré

Vestige d'une fenêtre du dortoir des moines

Ensuite, en passant par l’entrée ouest, nous nous sommes rendus à l’arrière du prieuré pour une autre lecture. Celle-ci nous a rappelé que, sur le toit de la chapelle, Alice Cherbonnel avait fait construire un belvédère qui n’existe plus et dont témoignent les cartes postales anciennes. Il en subsiste l’escalier d’accès dans les combles du bâtiment est. Elle y venait lire et écrire dans le calme et en hauteur. Par ailleurs, il y avait sans doute autrefois un clocher-peigne, attesté par la trace du cordon des cloches sur un des murs de la chapelle.

La voûte de la salle capitulaire

Dans la salle capitulaire

Notre visite s’est achevée avec la salle capitulaire qui présente une belle arcature dite Plantagenêt (typique de l’Anjou), d’une remarquable harmonie. M. de Rivière souhaiterait la restaurer et enlever l’affreux badigeon gris XIXe qui la recouvre. Contrainte de partir à cause d'un impératif vespéral, j'ai regretté de ne pouvoir assister au récital donné par le groupe saumurois Les Chats noirs, dont fait partie Anne Faucou.  Ces chanteurs sont spécialisés dans un répertoire de chansons contemporaines de l'époque d'Alice Cherbonnel. Ce sera pour une autre fois !

J’ai beaucoup aimé cette balade dans un endroit tout proche de mon village de Rou-Marson et dont j’ignorais tout. A noter qu’Anne Faucou présentera Alice Cherbonnel lors d’une conférence qu’elle fera au Breui-Bellay le samedi 15 septembre 2018, à l’occasion des Journées du Patrimoine.

 

Sources :

Les panneaux informatifs sous l’auvent monumental de la chapelle

Les commentaires de Sophie Sassier

Wikipedia.org

Crédit photos :

ex-libris.over-blog.com

 

 

 


 

 

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30 juin 2017 5 30 /06 /juin /2017 13:31

La dragonne sur le tertre de Marson

Jeudi 22 juin 2017, au soir d’une journée caniculaire, une vingtaine de promeneurs se sont retrouvés pour une balade ombragée en Land Art, sur le tertre et dans les bois de Marson. Organisée conjointement par la Bibliothèque de Rou-Marson et par l’association du Patrimoine Environnement Botanique, cette promenade vespérale leur a permis de découvrir des installations réalisées en pleine nature par les adhérents de cette association.

Pommier, gui, serpe et champignons dans un cercle magique

« Out, in the open… » disent les Américains pour parler de cette expression artistique de loisir qui met en valeur « ici ou là une souche torse, un morceau de bois mort ou un beau rocher ». A la portée de tous, le Land Art est simple à réaliser, éphémère et sans prétention. C’est ainsi qu’au rythme de neuf haltes, les promeneurs ont pu découvrir des réalisations variées et inventives, d’une « Princesse dragonne » en branchages à de surprenants champignons, en passant par le « Cercle magique » d’un pommier, une « Tempête de troncs et de lianes » ou encore le « Repaire du paon-loup ». Autant d’installations comme des portes ouvertes à l’imaginaire de chacun.

Attention, le danger vient d'en-haut !

Cette promenade pleine de découvertes était conduite par Renée Monnier, botaniste émérite et prolixe raconteuse d’histoires, notamment sur la commune de Rou-Marson. La déambulation était aussi ponctuée de textes variés, choisis en fonction de l’imaginaire suscité par les réalisations du Land Art. Etaient ainsi notamment convoqués des poèmes : « Le dragon doux », « Arbre ce bras », ou encore « L’agneau et le loup » de Raymond Queneau ;  « Souche » de Jules Supervielle, « Racines» de Pierre Seghers, « Champignons » de Norge. On y a également entendu la chanson "Les blés d'or" d'Armand Mestral et des extraits d’Alice au pays de merveilles et du Petit Chaperon Rouge, tandis que les promeneurs étaient invités à égrener à voix haute des proverbes d’origines diverses exprimant la relation de l’homme au loup.

Clic-Clac

Cette balade s’est terminée dans la cave communale de Rou-Marson dont les promeneurs ont apprécié la fraîcheur bienvenue et les gourmandises proposées par les animateurs. Et à l’image des tenants du Land Art, ils auront pu redire ces vers de Jean-Hugues Malineau entendus lors de la promenade :

Le soleil a mis la nappe dans la clairière

ma petite-fille joue à la dînette

avec les bourgeons-confiture

et les brindilles-fourchette

La tribu des champignons

 

 

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5 février 2015 4 05 /02 /février /2015 18:24

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 La plage de Cofete vue du belvédère de la Degollada de Agua Oveja

(Photo ex-libris.over-blog.com, samedi 27 décembre 2014)

Quand Jean de Béthencourt, en 1404, met le pied sur la terre volcanique de l’île rouge d’Herbania (« qui n’a pas d’herbe »), il s’exclame : « Que fuerte ventura ! » (« Quelle grande – ou forte – aventure ! »), donnant ainsi son nom à cette île aride des Canaries. Ce bout de terre arrachée aux volcans, à cent kilomètres seulement des côtes africaines, est en effet sauvage et solitaire et il faut un certain temps pour s’acclimater à ces terres brûlées où s’enfuit parfois une chèvre, où un busard pique dans le fond d’un barranco.

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Miguel de Unamuno à Fuerteventura

C’est sur cette terre austère que fut déporté, de mars à juillet 1924,  le grand écrivain espagnol Miguel de Unamuno y Jugo (1864-1936). S’étant élevé par ses écrits contre la dictature de Primo de Rivera, il fut ainsi relevé de ses fonctions de recteur de l’université de Salamanque. En dépit de l’exil, cette île violente dut convenir à celui qui sut exprimer les tourments de l’âme espagnole et son mysticisme foncier dans Le sentiment tragique de la vie chez les hommes et chez les peuples (1912). Il écrit ainsi : « Cette île a un style propre, un style qui est celui du squelette. Sa terre est squelettique comme ses ruines volcaniques, ses montagnes en bosses de chameau […] surgies du fond de la mer, un don pour ceux qui savent ce qu’est le secret intime de sa force. »

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Vue surplombante de la plage de Cofete

(Photo ex-libris.ver-blog.com, samedi 27 décembre 2014)

En nous rendant cet hiver en 4x4 sur la péninsule de Jandia, au sud de l’île de Fuerteventura, nous avons pu approcher cette beauté si particulière. Empruntant une piste poudreuse et tortueuse, construite en 1946 par des prisonniers politiques de la colonie pénitentiaire de Tefia, dans un décor de montagnes âpres et grises, nous sommes parvenus au belvédère de la Degollada de Agva Oveja. C’est de là que nous avons d’abord découvert le panorama sublime de l’infinie plage de Cofete qui a servi de cadre au récent film Exodus. Au pied des falaises, se situe en effet la cuvette du cratère de Jandia, dont la plus grande partie a disparu dans l’océan Atlantique et dont ne subsiste que la partie sud de la caldeira, qui forme l’impressionnant Arco de Cofete.

P1300980.JPGL'entrée du cimetière marin de Cofete

(Photo ex-libris.over-blog.com, samedi 27 décembre 2014)

Guidés par les candélabres des euphorbes, nous avons atteint le hameau de Cofete, fait de cabanes sommaires sans eau ni électricité. Nous avons ensuite accédé à la plage composée d’un sable blanc, issu de la décomposition des roches et des coquillages où se trouve l’émouvant premier cimetière marin de l’île. Balayées par le vent, à même le sable, les tombes des premiers habitants témoignent d’un passé lointain et ignoré. On raconte que c’est là que seraient enterrés les bagnards ayant construit la piste qui mène de Morro Jable à Cofete.

P1300978.JPGLe cimetière marin de Cofete

(Photo ex-libris.over-blog.com, samedi 27 décembre 2014)

Au loin, à 1,5 kilomètre, dressée devant son mur de montagnes, la Villa Winter nous a fait signe. Elle fut édifiée entre 1946 et 1958 par l’ingénieur allemand Gustav Winter. Le maître des lieux, qu’on appelait don Gustavo, était célèbre par ses lunettes et son chien noirs. Il isola sa demeure de toute intrusion en devenant le gestionnaire unique de la péninsule de Jandia dont il avait obtenu la location. Disposant de deux étages, d’une tour dans la partie nord-ouest et d’un balcon face à la mer, la Villa Winter est désormais dans un état de quasi abandon.

P1300997.JPGLa Villa Winter, vue de la plage de Cofete

(Photo ex-libris.over-blog.com, samedi 27 décembre 2014)

La vieille Rosa (que nous avons aperçue assise telle une momie à l’entrée gauche du patio), et son frère, y vivotent chichement, ayant obtenu l’autorisation d’y demeurer jusqu’à leur mort. Ensuite, la société immobilière allemande qui en est la propriétaire mettra la maison en vente. Dans ce bout du monde aride, les deux vieillards l’entretiennent ; enfin c’est un bien grand mot car la demeure, qui eut son heure de gloire, se délabre inéluctablement.

P1300998.JPGLe patio de la Villa Winter

 (Photo ex-libris.over-blog.com, samedi 27 décembre 2014)

La Villa Winter distille une atmosphère très particulière d’autant plus qu’elle jouit d’une réputation sulfureuse des plus fantaisiste. La légende court auprès des Allemands que le Führer y serait venu et que la tour de la Villa aurait fait usage de phare pour les sous-marins allemands croisant dans les parages. Certains vont jusqu’à prétendre qu’après la guerre, la maison aurait servi de clinique de chirurgie esthétique pour des criminels nazis désireux de se créer un nouveau visage avant de gagner l’Amérique du Sud !

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La tour de la Villa Winter

(Photo ex-libris.over-blog.com, samedi 27 décembre 2014)

Tout cela n’est guère sérieux et on sait seulement que Winter construisit non loin de là une piste d’atterrissage, désormais désaffectée, qu’il fora des puits, qu’il tenta de reboiser avec des pins le Pico del Zarza, et qu’il encouragea les cultures sur les restanques – notamment la pomme de terre (les célèbres papas) et la tomate. Dans cette maison solitaire et farouche on a installé un petit musée rural qui présente des instruments aratoires et des sculptures fantaisistes. Tout cela sent la relégation et l’abandon et, quand on est à l’intérieur, on n’a qu’une envie, celle de sortir sur la terrasse pour respirer le ciel et la mer.

P1310019.JPGLa mer vue de la terrasse de la Villa Winter

(Photo ex-libris.over-blog.com, samedi 27 décembre 2014)

Et c’est bien la fascination de la mer que Fuerteventura révéla à Unamuno en exil, cette mer « demeurée jusqu’alors pour lui une puissance inconnue et presque hostile ». « La mar » fit véritablement son entrée dans l’âme et l’œuvre de l’écrivain et devint un des éléments essentiels de son « paysage poétique ». Et, du haut de la terrasse de la Villa Winter, devant ce panorama non-pareil à 180°, on comprend pourquoi l’écrivain basque aurait aimé achever ses jours dans l’Ile Pourpre de Pline, où la mer est partout.

 

Sources :

Persée : Sebastiàn de la Nuez, Unamuno en Canaries

dominicus.malleotus.free.fr/canaries/village_cofete.htm

http://www.villawinter.com/chronik.htm

 

 

 

 

 

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6 mars 2014 4 06 /03 /mars /2014 22:45

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Lundi 3 mars 2014, à Erdeven, on annonçait des coefficients de 114-115... et la tempête Christine. Au moment de la marée montante, entre 17h 15 et 18h 15, nous sommes allés voir la mer. Le contraste était saisissant entre le calme de la dune, couverte de petits lacs créés par les pluies récentes, et la violence des vagues sur la plage. De la route bordant la dune, on apercevait déjà les projections d'écume.

Nous avons fait plusieurs allées et venues entre les différentes plages, tandis que le ciel virait au sombre pour s'éclairer ensuite. Dans l'anse de Kérouriec, la mer tempêtueuse était survolée par un kyte-surf fou. A La Roche Sèche, le blockhaus, indestructible, disparaissait sous des giclées d'écume. Dans le froid et le vent, à Kerminihy, les vagues passaient par-dessus la dune et s'écoulaient sur le chemin côtier.

De retour à La Roche Sèche, tandis que la mer était un peu descendue, un petit groupe de gravelots à collier interrompu, indifférent à la violence du ressac, s'amusait sur le sable.

 

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La mer à l'assaut de la dune

(Photo ex-libris.over-blog.com, lundi 3 mars 2014)

 

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Les vagues autour de l'île de Moëlan devant Kérouriec

 

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La mer à Kérouriec

 

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Le blockaus de La Roche Sèche en proie aux vagues

 

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Les vagues sur les rochers de Kerouriec

 

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La mer vue du petit parking de Kerminihy

 

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Les vagues à l'entrée de la ria d'Etel

 

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Les vagues à Kerminihy

 

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La mer envahit la dune à Kerminihy

 

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Les gravelots à collier interrompu sur la plage de La Roche Sèche

 

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L'arc-en-ciel après la tempête

 

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Les calmes lacs de pluie dans la dune d'Erdeven

 

 

 

Photos ex-libris.over-blog.com, lundi 3 mars 

 

 


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16 juillet 2013 2 16 /07 /juillet /2013 22:10

Baptême de Gabrielle et Erdeven avec C et D 001

La nef à vaisseau unique de Saint-Nicolas-et-Saint-Marc de Ville d'Avray

 

Le samedi 29 juin 2013, à l'occasion du baptême de notre petite-fille Gabrielle, nous avons découvert l'église paroissiale de Ville d'Avray, Saint-Nicolas-et-Saint-Marc. On ne se doute pas que derrière cette architecture extérieure néo-classique très sobre dans sa blancheur, au-delà de son porche encadré de lignes de refends et surmonté d'un fronton Louis XVI, sous son clocher carré peu élevé, se cachent des oeuvres d'art exécutées par des artistes amoureux de cet endroit des Hauts-de-Seine.

On notera que c'est, avec Courbevoie, une des rares églises édifiée (ou plutôt ici réédifiée) pendant la Révolution. Elle porte d'ailleurs dans son nom la trace de son histoire. Elle a en effet succédé à l'église Saint-Nicolas (XII°-XIV° siècles), située au coeur de l'ancien village de Ville d'Avray, sur la colline dite du Monastère. Devant son délabrement, c'est le baron Marc-Antoine Thierry, seigneur de Ville d'Avray, intendant général du Garde-Meuble de la Couronne, qui décida de construire une nouvelle église en 1788, avec l'aide du Roi. Pour ce faire, il s'entoura de l'entrepreneur des Bâtiments du Roi, Jacques Marquet, et de l'architecte royal Charles-François Darnaudin, créateur de l'hôpital civil de Versailles. En hommage à Marc-Antoine Thierry, la nouvelle église prit ainsi le second vocable de Saint-Marc.

La première pierre en fut posée le 11 juillet 1789. Par la suite, le curé de l'époque, l'abbé Dugarry, ayant refusé de prêter serment à la Constitution Civile du clergé, il se vit remplacé par un prêtre assermenté. Elle sera ainsi consacrée en 1791 par un prêtre constitutionnel. La même année, les vases sacrés de la paroisse sont vendus ; en 1793, elle devient temple de la Raison. Elle ne sera rendu au culte catholique qu'en 1795, dans un état très dégradé. En 1803, après restauration, on installe dans le clocher les cloches de l'église de Marnes-la-Coquette, détruite quant à elle en 1793. Saint-Nicolas-et-Saint-Marc fera l'objet d'une autre réfection par Poirot en 1830. D'autres travaux entre 1971 et 1993 lui redonneront son lustre et sa beauté.

Baptême de Gabrielle et Erdeven avec C et D 042  Le père Klasen devant La Descente de Croix

Quand on entre dans cette église en forme de croix latine et à vaisseau unique, on est surpris par l'équilibre et l'harmonie qui s'en dégagent. La voûte est ornementée de caissons sculptés que l'on retrouve aussi sur la coupole aplatie au-dessus de la  croisée du transept. Le regard est attiré par un retable  XIX° de belle facture, de Félix Cassel, représentant La Descente de Croix. Cette toile fut offerte à l'église par le gouvernement de Louis-Philippe. Le transept peu saillant est occupé par deux chapelles latérales tandis que le choeur hémi-circulaire est surmonté d'une voûte en cul-de four ornée d'une fresque aux couleurs vives, dédiée à saint Nicolas. L'ensemble séduit par l'homogénéité des sculptures et la symétrie des vitraux, celles-ci contribuant à créer une beauté classique, toute faite de sérénité et d'équilibre. 

Baptême de Gabrielle et Erdeven avec C et D 007

Le Baptême du Christ, François Rude

Mais ce qui retient surtout l'attention, ce sont les oeuvres des artistes qui séjournèrent et aimèrent Ville d'Avray. On remarque ainsi plusieurs sculptures du sculpteur Jean-Jacques Pradier, dit James Pradier (1792-1852) qu'appréciait particulièrement Louis-Philippe. L'artiste, ayant acheté une maison à Ville d'Avray en 1830, offrit à l'église certaines de ses réalisations. Ainsi, en 1840, il lui fait don de trois modèles en plâtre. Le Mariage de la Vierge, dont l'original est dans l'église de La Madeleine, est situé à droite de l'entrée du choeur en absideLa Vierge en prière, dont le marbre est dans la cathédrale d'Avignon, est placée à droite de l'entrée du transept ; la statue de saint Louis (1849), enfin, qui orne la place Saint-Louis à Aigues-Mortes, se trouve près de l'entrée sur la droite.

Baptême de Gabrielle et Erdeven avec C et D 014

 Saint Louis, James Pradier

François Rude (1774-1855) offre quant à lui le grand plâtre du Baptême du Christ (Musée du Louvre), réalisé entre 1835 et 1841, dont on remarque la puissance. Il est situé à gauche de l'entrée du choeur. L'original est aussi à l'église de La Madeleine.

D'autres sculptures encore, très XIX°, je dirais, sans rien pourtant de trop saint-sulpicien : de Francisque-Joseph Duret, un serein et majestueux Christ ressuscité ; d'Antonin-Marie Moine, un Ange tenant un encensoir (côté nord de la nef) et un Ange portant un calice (première moitié du XIX°) ; L'Enfant et son Ange gardien d'un artiste inconnu.

Baptême de Gabrielle et Erdeven avec C et D 006

 Le Mariage de la Vierge, James Pradier 

Enfin, on sait que le peintre Corot (1796-1875) avait fait de Ville d'Avray sa petite terre d'élection : il y peignit en effet plus de deux cents toiles ! En 1856, Pour les transepts de l'église, il réalisa quatre fresques à l'huile, directement sur le mur des croisillons nord (Adam et Eve chassés du Paradis et Marie-Madeleine au désert) et sud (Le Baptême du Christ et le Christ au jardin des Oliviers).

Baptême de Gabrielle et Erdeven avec C et D 057Adam et Eve chassés du Paradis, Corot

Sur le mur sud de la nef, on remarque aussi Saint Jérôme au désert. Cette toile a pour décor un paysage de rochers et de végétation représentatif de son style, dans une gamme restreinte de couleurs. Au premier plan, le saint ermite est en extase, agenouillé sur un pierre plate, où l'on voit une Bible et un crucifix. Derrière lui repose le lion, typique de son iconographie. Le corps du saint présente un aspect livide et violacé. Corot racontait qu'il n'avait pas les moyens de chauffer son atelier et que son modèle était mort quinze jours après avoir posé !

Baptême de Gabrielle et Erdeven avec C et D 003

Saint Jérôme au désert, Corot

Saint-Nicolas-et-Saint-Marc recèle encore d'autres toiles, de Jules Richomme (1818-1903) notamment. A gauche, au-dessus de la porte de l'escalier de la tribune, on remarque L'Entrée du Christ à Jérusalem. A droite, surmontant la chapelle des fonts baptismaux, une toile représente Le Christ portant sa croix. Le Repos de La Sainte Famille pendant la fuite en Egypte prend place dans le transept droit, au-dessus de la porte. Enfin, la toile de Saint Nicolas apparaissant à des marins battus par la tempête est située dans le transept gauche au-dessus de l'autel.

Baptême de Gabrielle et Erdeven avec C et D 004

 Le Christ en croix

Parmi les autres toiles de Auguste Hesse (Le Christ insulté par ses bourreaux, deuxième quart du XIX°), de Romain Cazes (Le Christ au désert adoré par des anges, milieu XIX°), j'ai beaucoup aimé un Christ en croix du XVIII°, en trompe-l'oeil, et surtout une charmante Vierge à l'Enfant du XVI°.

Baptême de Gabrielle et Erdeven avec C et D 010

Vierge à l'Enfant

J'aimerais ajouter que c'est le père Klasen qui a célébré le baptême de Gabrielle et d'une autre petite fille du nom de Noémie, d'origine libanaise. Avant de pénétrer dans l'église, au moment de l'accueil, le célébrant nous a expliqué avec clarté le sens du mot "station" dans la liturgie et il a insisté sur la nécessité d' "une Eglise debout".

Baptême de Gabrielle et Erdeven avec C et D 011

Le Couronnement de la Vierge (Vitrail offert par la famille Fournier)

Dans la douce lumière de cette église, créée par de superbes vitraux, offerts par la famille Fournier en 1886 (Le Couronnement de la Vierge (croisillon nord) et La Sainte Famille (croisillon sud),  notre petite-fille, sous le signe de l'Eau et du Saint-Chrême, a reçu le baptême. Celle qui est née dans la lointaine Australie, dont les grands-pères maternel et paternel viennent de l'au-delà  de la Méditerranée, est entrée dans la vaste communauté des chrétiens, en compagnie d'une autre enfant, dont les racines sont au Pays des Cèdres.  Un beau symbole de l'universalité de l'Eglise que cette rencontre baptismale  à Saint-Nicolas-et-Saint-Marc, dans une  église aimée et embellie par des artistes.

Baptême de Gabrielle et Erdeven avec C et D 055

 Baptême de Gabrielle et Erdeven avec C et D 008Baptême de Gabrielle et Erdeven avec C et D 056Baptême de Gabrielle et Erdeven avec C et D 009Baptême de Gabrielle et Erdeven avec C et D 017

 

Sources :

www.patrimoine-histoire.fr

www.fr.topic-topos.com

www.wikipedia.org

www.culture.gouv

www.paroissevda.over-blog.com

Crédit photos : ex-libris.over-blog.com

 

 

 

 

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19 mars 2013 2 19 /03 /mars /2013 17:30

 

 Fenetre-4.JPG

 

Dimanche 17 mars, pour clore le Printemps des Poètes, La Maison des Littératures à Saumur, proposait une balade poétique. Bravant les giboulées de mars, une vingtaine d’amateurs de poésie ont été accueillis dans la cour de la Maison du Roi par le président de l’association, Claude Guichet, et par Valérie Reyre-Coquériaux.

Une brève présentation de la Maison du Roi, par un jeune guide de la Ville, nous a d’abord fait rêver sur les monarques qui séjournèrent dans ce logis seigneurial (XV°, XVI°, XIX° siècles). Il reçut en effet Charles VII, Henri IV, Marie de Médicis, Louis XIII et Anne d’Autriche. Ensuite, nous avons marché dans les pas des trois écrivains invités par l’association : Yves Leclair, Fabrice Caravaca et Liza Kerivel.

Après avoir tourné à droite dans la rue du Temple, nous avons pénétré dans la cour intérieure de l’hôtel, dit Cappel, mais ce professeur d’hébreu de l’Académie protestante n’y résida sans doute jamais. Il convient d’appeler cet élégant hôtel particulier Chesnon de Sourdé (XVI°-XVIII° siècles).

Yves Leclair public

Nous avons fait cercle autour de l’écrivain et poète saumurois, Yves Leclair, dont nombre d’œuvres ont été éditées au prestigieux Mercure de France. Avec l’humour dont il est coutumier, Yves, bien au chaud dans sa grosse écharpe de laine tricotée gris parme, avait choisi de lire des extraits de son recueil Prendre l’air, au titre de circonstance. Ce sont des  « feuillets de route » que le poète égrène au cours de ses balades, des instant fugitifs qu’il a l’art de métamorphoser en brèves méditations pleines de sagesse. Ainsi en est-il de cette « Petite philocalie » :
Tu entends cet air de guitare,
ce soir d’octobre où tout est noir.
Tu ne l’entendras pas toujours.
Retiens l’heure, qu’elle te soit lente !
Le bon temps, tu sais a des fuites.
Cette voix d’enfant qui résonne
claire à l’étage, écoute-la
bien, imprègne-toi de son timbre
lumineux. La nuit tombe vite
sur les yeux. Un jour il te faudra,
coûte que coûte, regagner
le grand trou noir. Aime longtemps
la vie si près du ciel, ce soir.     


Ecoutant J. jouer de la guitare

Et A. chantonner à l’étage, Bagneux,

6 octobre 1998

 Yves Leclair

Les mots d’autres poèmes se sont envolés dans l’air froid : nous avons entraperçu le « vieux nocher » de « Barque funèbre » ; nous avons écouté l’appel à « danser dans le vent sur la route », « Sur un vers de W. B. Yeats »… Puis, Yves Leclair a ouvert Le journal d’Ithaque, quatre-vingt-dix-neuf dizains qui nous promènent de Chaintres à la Crète en passant par l’Alsace ou l’Italie. Il nous a distillé quelques-un de ces dizains dont il a le secret. Parmi eux, « Tour opérateur », qui ouvre le recueil en ironisant sur les voyages organisés ; « Le chien perdu de la rime » qui dit le secours sans faille de la rime pour le poète quand « Chaire du poète » joue habilement du vocabulaire religieux. Ceux qui furent- ou qui sont- les élèves d’Yves Leclair connaissent son art de jouer avec les mots simples ou savants. Et c’est ce subtil dosage entre extrême simplicité et grande érudition qui est un des charmes- et non des moindres- de l’écriture d’Yves Leclair, celui qui sait si bien découvrir « l’or du commun » dans le quotidien le plus banal.

Fabrice Caravaca 3

Par les rues endormies, dans cet après-midi froid de mars, nous nous sommes ensuite dirigés vers la chapelle Saint-Jean, un lieu assez méconnu des Saumurois eux-mêmes. Chef-d’œuvre du gothique angevin, aux voûtes particulièrement remarquables, elle appartint aux Hospitaliers de Saint-Jean de Jérusalem. Cette chapelle est un lieu de recueillement propice à l’écoute des mots de Fabrice Caravaca, jeune écrivain de Limoges, et créateur de la maison d’édition Dernier Télégramme, qui nous a lu plusieurs extraits de ses textes. Sous les fines et élégantes nervures des voûtains, sa longue silhouette d’adolescent nous a donné à entendre notamment des extraits  de sa première œuvre publiée, La Vie, aux éditions des Fondeurs de Briques. « Cinquante-quatre fragments, qui dialoguent et forment un chant », composent ainsi une successions de pensées, de situations, de réflexions qui peuvent être celles de tout un chacun, à un moment ou à un autre de sa vie. La particularité de ce texte est d’être rédigé à la première personne du pluriel, ce qui lui donne une ampleur inaccoutumée. On est d’abord surpris par ce « nous conquérant », assez étonnant chez un si jeune écrivain, mais bientôt cet emportement nous saisit et nous entraîne loin, vers des territoires emplis d’espoir, de fraternité et de sérénité. J'ai beaucoup aimé le passage où Caravaca évoque comme en une litanie les poètes de son panthéon personnel :

" Ossuaire : Cendrars autour du monde. Ossuaire : le sang rouge de Federico garcia Lorca. Ossuaire : Georg Trakl et sa soeur. Ossuaire : Emily Dickinson seule et seule. Ossuaire : Fedor Dostoïevski et le coeur de l'homme. Ossuaire : Lautréamont et le coeur de l'océan. Ossuaire : Allen Ginsberg..."

Dédiée à trois poètes que Fabrice Caravaca affectionne, ce long poème lyrique, à la tonalité unanimiste et aux accents sacrés, a trouvé une résonance particulière dans ce beau lieu.

« Nous commençons. Nous recommençons. Nous ne nous 

arrêtons plus. Nous sommes ivres déjà de beauté. Nous 

avançons. Nous n'avons plus le choix. Il y a de grands 

arbres. Et des histoires tout en haut. Il y a aussi du vert et 

de la couleur et aussi de la lumière un peu plus loin.

Nous en voulons encore. Nous en voulons toujours. 

Nous sommes vivants. »

 fabrice-Caravaca.JPG

La dernière étape de cette balade poétique nous a conduits dans la salle Duplessis-Mornay de l’Hôtel de Ville de Saumur (XVI°-XVII°-XIX° siècles). Liza Kerivel, qui habite à Saint-Nazaire et publie depuis 2009, a lu des extraits de ses deux  romans. Ceux-ci racontent des histoires de femmes. Métamorphoses de la fuite et des saisons (2012) évoque la disparition de l’une d’entre elles sur le parking d’un super marché. L’auteur nous a lu d’abord un passage où le mari, demeuré seul, ne sait comment consoler ses enfants. Puis, de sa voix douce et claire, elle a dit des extraits de son premier roman, Inventaire des silences, paru en 2010. Il s’agit du long monologue d’une femme qui a quitté sa famille et qui tente de l’expliquer à ses enfants.  Mais d’expliquer quoi, au juste ? Les silences du quotidien, le poids de la routine, la vie qui s’enfuit, l’incompréhension qui ronge, la solitude en famille… Ici encore, on ne peut qu’admirer, chez un jeune écrivain, cette plongée extralucide dans l’intimité d’une femme, d’une épouse, d’une mère. Dire pour tenter de rompre ce silence mortifère qui fut le sien pendant plus de vingt ans  : « Le silence est là qui m’a toujours accompagnée. Si épais qu’avec lui, j’aurais pu me tricoter une écharpe et la serrer autour de mon cou. Si fort, en disant tout bas : il suffirait de presque rien. »

Liza K

C’est sur ce moment intense que s’est achevée cette balade poétique. Liza Kerivel, tout en remerciant les membres de La Maison des Littératures de l’avoir accueillie avec la chaleur de l'amitié, a évoqué Albane Gellé, première Présidente de l’association, en soulignant que c’est elle qui avait eu l’idée de cette promenade en poésie. Une initiative que tous souhaitent bien sûr voir se renouveler, par un temps qui serait plus printanier.

 


Bibliographie d'Yves Leclair: link 

Dernières parutions :  

Chansons pour un amour lointain, Jaufre Rudel, Préface et adaptation d'Yves Leclair, Mai 2011, Fédérop

Guy Goffette, Sans légende, Yves Leclair, Octobre 2012, Editions Luce Wilquin

Fabrice Caravaca : link

Liza Kerivel :link

 

Crédit photos : ex-libris.over-blog.com

 

 

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31 juillet 2011 7 31 /07 /juillet /2011 17:19

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             Mise au Tombeau de Jacques Lespaignol (1699-1702),

              crypte de l'ossuaire de Saint-Thégonnec (14 juillet 2011)

 

 

 

 

Dans la demi-pénombre

De la crypte de l'ossuaire

Tragique

Les dorés éclatants

Les doux drapés

Ne viendront pas à bout

De l'hermétisme des visages

Du silence des larmes

De la dure roideur de la Mort

 

     

 

 

 

Pour la communauté de Hauteclaire,  Petit Patrimoine du Week-end  

 

 

 

 

 

 

 

 

 

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13 juin 2011 1 13 /06 /juin /2011 17:24

  st andré des marins 1

Chapelle Saint-André-des-Marins, à Loon-Page (59)

(Photo ex-libris.over-blog.com, Vendredi 03 juin 2011)

 

 

Quand on arrive à Saint-André-des-Marins, là-bas vers l’embarcadère des ferries, au port de Loon-Page, on voit les griffes des grues et des portiques de manutention sur le ciel gris, on sent le vent et on devine la mer à cinq cents mètres.

 

st andré des marins 2

Les portiques de manutention à Loon-Plage

(Photo ex-libris.over-blog.com)

 

En contrebas de la route, dans un arc de cercle formé par des plantations desséchées par le vent, la chapelle que rêva le père André Delepoulle s’offre à la vue dans la simplicité bleue de ses trois containers made in China. C’est en effet l’ancien vicaire épiscopal qui est à l’origine de cette halte spirituelle, édifiée à l’attention des marins en escale. Et c’est en son honneur qu’elle porte son prénom.

Dans ce no man’s land, tout à côté du Seamen’s Club, dont les membres font la navette entre les quais et la chapelle, Saint-André-des-Marins dresse les 12 mètres de son clocher bleu, vissé verticalement sur un socle en béton, qui surplombent les deux autres containers. Le choix de ce matériau s’est imposé à l’architecte, Jérôme Soissons : le container n’est-il pas ce moyen si propre à établir le lien entre la terre et la mer ?

 

St André des marins

  L'autel de Saint-André-des-Marins

(Photo ex-libris.over-blog.com)

 

Son fils Raphaël a conçu le mobilier de la chapelle dans du bois de marine récupéré dans le port. Sur les murs crépis d’un jaune pâle, au-dessus de l’autel, une tenture bleutée est brodées des symboles des grandes religions, manifestant ainsi la dimension œcuménique du lieu. Quant au puits de lumière du clocher, il éclaire une mappemonde multicolore.

 

St André des marins puits de lumière

  Le puits de lumière du clocher de Saint-André-des-Marins

(Photo ex-libris.over-blog.com)

 

Née du désir d’un marin philippin qui souhaitait une escale spirituelle, réalisée grâce à l’opiniâtreté du père Delepoulle et à l’action des bénévoles qui récoltèrent plus de 60 000 euros pour son édification, cette chapelle, inaugurée en septembre 2010, est un lieu unique. Chaque samedi, le père Manu Langrand y célèbre un office où se retrouvent routiers polonais en partance pour l’Angleterre et marins de tous horizons.

 

St Andre des marins carte

La mappemonde sous le clocher à Saint-André-des-Marins

(Photo ex-libris.over-blog.com)

 

Et dans ce lieu, livré au vent de mer, où souffle l’Esprit, j’ai pensé à ce très beau poème d’Andrée Vivien :

 

Chapelle de marins

 

Voici le soir… Voici l’orage aux cris amers,
Et la foule s’assemble au fond de la chapelle
Où l’on cherche Marie et n’espère qu’en Elle.

 

O vaisseau qui se noie en l’abîme des mers,
O Dieu ! je cherche en vain l’ombre de la chapelle,


Voici le soir… Voici l’orage aux cris amers.

Et dans mon cœur sévit la tempête des mers !


O Dieu ! je cherche en vain l’ombre de la chapelle.
Marie ! – O lys très blanc, qui règnes sur la mer !

 

 

 

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1 mai 2011 7 01 /05 /mai /2011 08:44

  Lathan le labyrinthe

  L'entrée du labyrinthe (Dimanche des Rameaux, 2009)

 

A 65 kms à l’est  d’Angers, se trouve le château de Lathan, dans le village de Breil, au milieu d’un grand parc d’une quarantaine d’hectares. Les deux châteaux des XV° et XVII° siècles ayant été détruits, le château actuel fut construit en 1862. Il s’est parfaitement intégré à un parc, où coexistaient un jardin classique et un jardin paysager romantique.

Le premier rassemble les principaux éléments théorisés par Le Nôtre : bosquets géométriques,  charmilles en étoile, jeux d'eau et statuaire très étudiés. Y poussent trois essences d’arbres : le chêne, le charme et le tilleul. De grandes perspectives y furent créées, représentées ici par un canal de 500 mètres, bordé d’une double allée de tilleuls et surplombé par une « gloriette ». L’eau est d’ailleurs un élément très présent ici. Une première arrivée d’eau se fait par le Lathan qui vient alimenter ce grand canal. Une seconde, appelée la Planchette, rassemble les émissaires de la partie haute du village, qui alimentent la cascade, laquelle se déverse dans le bassin appelé Miroir. Ce dernier est en lien avec le grand canal par une galerie souterraine.

 

Lathan le canal  Le grand canal et la gloriette (Dimanche des Rameaux, 2009)

 

Le second jardin, dont ne demeure qu'une partie, use des procédés imaginés au XVIII° siècle (allées curvilignes, îles, fabriques antiquisantes). Il donne une image recomposée et idéalisée d'une nature « à la Rousseau ». (M.O Mandy, 2002). Près de deux cents arbres et arbustes d’essences différentes, y proposent une nature romantique en liberté.

On peut voir encore de beaux pavillons des XVII° et XIX° siècles.

 

 Lathan le temple d'amour

Le temple d'Amour (Dimanche des Rameaux, 2009)

 

L’intérêt majeur de ce château privé est qu’il possède surtout le seul parcours galant complet connu à ce jour. Les propriétaires ont ainsi entrepris de restaurer le mystérieux labyrinthe souterrain, destiné aux amants en quête de « ce mystérieux objet dont [leurs] yeux étaient enchantés ». Long de cent-vingt cinq mètres, il est troué de trente-huit soupiraux, symbolisant les sentiments des amants, tout au long du parcours de l’amour et de la vie.

Il y a trois siècles, en effet, une précieuse angevine, Anne Frézeau de la Frézellière, fait construire au cœur de ce grand parc la reproduction de la Carte de Tendre imaginée par Madeleine de Scudéry (1607-1701). Dans le livre I de la première partie de son roman Clélie (1654-1660), Célère conte à une princesse l’histoire du prince étrusque Aronce et de la jeune Romaine Clélie. Il y décrit la fameuse Carte de Tendre, élaborée par cette dernière.

Il s’agit d’un itinéraire symbolique que les parfaits amants doivent suivre, en évitant les embûches et les obstacles. Voici le début de cette célèbre description : « Afin que vous compreniez mieux le dessein de Clélie, vous verrez qu’elle a imaginé qu’on peut avoir de la tendresse par trois causes différentes : ou par une grande estime, ou par reconnaissance, ou par inclination ; et c’est ce qui l’a obligée d’établir ces trois villes de Tendre, sur trois rivières qui portent ces trois noms, et de faire aussi trois routes différentes pour y aller. Si bien que, comme on dit Cumes sur la mer d’Ionie et Cumes sur la mer Tyrrhène, elle fait qu’on dit Tendre sur Inclination, Tendre sur Estime, et Tendre sur Reconnaissance. » Suit un parcours initiatique amoureux, qui doit permettre à l’amant de parvenir au but ultime, Tendre sur Reconnaissance.

C’est un des grands architectes français du XVIII° siècle, Victor Louis, qui se verra chargé de réaliser ce jardin. Au cours de ce parcours sentimental codifié, l’amoureux était accepté ou éconduit, au terme d’un itinéraire qui proposait trois issues. La sortie de l’Indifférence, dont l’accompagnement végétal est essentiellement constitué de conifères et d’arbres aux feuillage persistant ; aucune allée n’est tracée. Celui qui est rejeté est livré à lui-même. La sortie de l’Inimitié, dont la végétation est plus agressive et plus sauvage. C’est un parcours  confus, dont les allées ne mènent nulle part. Enfin la sortie triomphale, celle qui mène vers l’embarcadère de l’Ile d’Amour où se trouve le Temple de Vénus.

Alors, si l’envie vous prend de rêver à « la Nymphe divine » émergeant de l’onde, si vous souhaitez jouer au « corbillon », si vous n’avez de cesse de vous perdre dans le « promenoir des amants », n’hésitez pas à pousser la grille de ce parc mélancolique où erre l'âme des précieuses.

  Carte du tendre

La Carte de Tendre, Gravure du XVII° siècle, Paris, B. N.

L'itinéraire complexe de l'amour précieux

 

Sources :

L’Anjou, Entre Loire et tuffeau, Editions Ouest-France, Philippe et Catherine Nédélec

Itinéraires littéraires, XVII° siècle, Hatier, 1988

gralon.net/…/info-parc-de-lathan-955.h

www.jardinez.com

dep49-parc-de-lathan-breil-

 

 

 

 

 

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25 avril 2011 1 25 /04 /avril /2011 15:50

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Saint-Sulpice de Rou, la façade au sud

 

Après l’église Sainte-Croix de Marson, et en ce lundi de Pâques, je voudrais vous faire découvrir l’église Saint-Sulpice de Rou, sa petite sœur. Rou et Marson ne sont-elles pas jumelées depuis bien longtemps ?

La petite église de Rou, le bourg cité comme étant le plus ancien (Ecclesia de Ruu, Liv. N, ch. 57 et or.), est nommée dès le Xe siècle. Elle présente encore de beaux vestiges de la construction du XIe siècle.

De plan rectangulaire, légèrement brisé par l’inclinaison symbolique du chevet, elle offre une nef unique, dont les murs en petit appareil sont éclairés vers le nord-est de trois petites fenêtres romanes en plein cintre, datées du XIe siècle. Le portail et toute la façade sont du XIIIe siècle, ainsi que le chœur et le clocher. Le pignon nord-ouest se prolonge d’un couronnement percé de deux baies, dont une avec justement le clocher. A l’intérieur, on pouvait admirer quatre statues de bois du XVe siècle. Le grand autel porte la date de sa construction : 1751. A l’entrée du chœur se trouve la tombe, servant de marche, du curé Samson, mort le 3 avril 1663. Hercules de Launay, seigneur de Rou, qui épousa Suzanne Leroux de la Tour de Ménives, le 26 juin 1661, fut inhumé dans cette église, le 29 octobre 1702.

Le lundi de Pâques de l’année 1921, un 28 mars, Mgr Joseph Rumeau, évêque d’Angers, en grand arroi, vint baptiser les deux nouvelles cloches ; elles avaient été en partie financées par les propriétaires du château de Marson, M. et Mme Fricotelle. Elles avaient été fondues par MM. Bollée, d’Orléans, en 1920.

s’appelait Marie-France. Elle remplaçait dans le campanile une vieille sœur nommée Marcelline et fondue par Mabilleau, à Saumur, en 1833. Quant à Mi, elle se prénommait Marie-Madelon.

 

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Saint-Sulpice de Rou, avant restauration

 

La Semaine Religieuse de l'année 1921 a rapporté la cérémonie du baptême des cloches. En voici les premières lignes : « Peut-être, cher lecteur, ne savez-vous pas où se trouve Rou-Marson. Alors regardez sur la carte : à moitié chemin environ entre Saumur et Doué, vous trouverez Rou d’abord et ensuite Marson ; de là vient Rou-Marson. C’est une petite paroisse du Saumurois, humble comme la violette, qui ordinairement ne fait pas parler d’elle ; mais le lundi de Pâques, il n’en fut pas de même. De Saumur, de Saint-Florent, des Ulmes, de Distré, de Verrie, on s’y rendait en foule. « Vous allez sans doute à Rou, au baptême des cloches, se disaient les bonnes femmes. – Oui, et vous aussi. – Mais oui. –Eh bien, alors nous ferons route ensemble… »

L’église Saint-Sulpice a été restaurée récemment grâce au lancement d’une souscription et à la Fondation du Patrimoine ; mais, en ce lundi de Pâques 2011, les cloches n’ont pas sonné à Rou. Où sont les Pâques fleuries et carillonnées de notre enfance ?

 

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Saint-Sulpice, vue du Chemin des Marais

 

Sources :

 Les Carnets du Patrimoine, Les Guides Massin

Le Bulletin Paroissial de Rou-Marson, n° 8, août 1917, n°10, octobre 1917, n°12, décembre 1917, n°53, mai 1921

 


 

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