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20 octobre 2009 2 20 /10 /octobre /2009 11:07

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Actuellement, au Théâtre du Quai à Angers, du 1er au 24 octobre, dans une mise en scène de Caroline Gonce, est à l'affiche Toute vérité, pièce co-écrite par Marie N'Diaye (Trois femmes puissantes) et Jean-Yves Cendrey (Le Japon comme ma poche et Honecker 21), deux écrivains à l'affiche de la rentrée littéraire, et mariés depuis vingt ans.

Il s'agit d'un affrontement (peut-être par-delà la mort) entre un père (Daniel Martin) et son fils (François André), auxquels leur haine mutuelle palpable ne laisse aucun répit.

A l'origine de la pièce, la lecture de la Lettre au père de Kafka. Jean-Yves Cendrey la reçoit « comme un crochet à la pointe du coeur » et il écrit à son tour sa propre lettre au père qu'il lira à l'occasion d'  « une conférence alimentaire » sur l'écrivain tchèque. Il l'oublie ensuite « au fond d'une boîte à brouillons ». Cependant Marie N'Dyae y décèle des vertus théâtrales et elle écrit le pendant au discours du fils. Elle se glisse « dans la peau du père et bourreau de l'autre personnage, qui se trouve être son mari » et qu'elle connaît depuis vingt-trois ans. Si le texte de Marie n'est guère agréable à l'époux, il constitue cependant une sorte de « structure mentale » très théâtrale, produit d'une « ambiguïté excitante pour un couple d'écrivains ». Jean-Yves Cendrey en a accepté le risque, respectant le principe de liberté absolue qui avait présidé au travail d'écriture.

La mise en scène de ce règlement de comptes à couteaux tirés souligne bien le fait que la parole du fils est dirigée vers le public plus qu'elle ne l'est  vers le père. Le fils est debout côté cour et regarde les spectateurs. Le père, assis dans un fauteuil, côté jardin, ne tourne jamais la tête vers son fils. Ce sont deux monologues qui ne peuvent se rencontrer. Jean-Yves Cendrey écrit: « Le fils ignore la présence du père. L'idée, c'était ça : une mise en danger du premier texte. » La particularité est donc bien que « le fils parle, [que] le père entend mais pas le fils qui continue. […] « C'est comme si le fils avait écrit ou raconté, et que très longtemps après, le père répond mais sans que le fils soit là. » La parole du père vient d'au-delà de la mort.

Cendrey précise encore qu'il ne s'agit pas d'un texte compassionnel en faveur du fils qu'il a été, mais bien plutôt d'un texte écrit « par haine des bourreaux. En écrivant on peut exercer cette haine, exercer un certain pouvoir et avoir à son tour une certaine autorité. » L'intérêt de la démarche d'écriture avec Marie N'Dyae est que la partie du père, qui est de la main de celle-ci, « vient mettre en danger cela » que dit le fils, puisque le co-auteur « est venue inciser ici et là avec la perversion et l'hypocrisie que le langage permet ». Elle ne va pas dans le sens du fils, elle permet au père de se défendre avec ses propres armes.

Sur le plan d'une écriture à quatre mains, la pièce est donc particulièrement intéressante. On reconnaîtra cependant que le texte (même si son intérêt est autobiographique) qui accumule les poncifs du père alcoolique, de la mère martyrisée et du fils battu, est difficile à supporter, d'autant plus que la mise en scène est très statique.
  Mardi 20 octobre

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