Mercredi 04 novembre 2009, la grande salle de 900 places du théâtre du Quai à Angers accueillait Vincent Delerm pour son tour de chant intitulé Quinze chansons.
Dans un décor aux allures de cinéma- écran, rideau rouge, silhouettes d’acteurs du noir et blanc, sans oublier le lion rugissant de la Metro-Goldwyn-Mayer- le tranquille et à la fois bondissant Vincent Delerm, tout de noir vêtu, a chanté quelques anciennes chansons (Deauville sans Trintignant, Fanny Ardant et moi, La vipère du Gabon) et celles de son dernier album, largement inspirées par le cinéma. C’est cela qu’on aime dans ses chansons : rencontrer des acteurs qui s’appellent tous Terence, arriver sur un générique de fin, avoir François de Roubaix dans le dos, être comme un chômeur fou dans un film de Ken Loach, et le soir regarder Scarlett Johanson dans le noir.
« Quand on a la chance que le public se déplace à un concert, il faut tout faire pour qu’il passe une bonne soirée. On ne peut pas se contenter d’aligner les chansons. » Aussi Vincent Delerm se transforme-t-il en un metteur en scène drôle, et fantaisiste qui crée une relation intime avec son public. Il conte des anecdotes improbables (comment un chanteur fait partie d’un jury de court-métrage, comment un couple cherche une place dans une salle de cinéma). Il entame un jeu de questions-réponses avec le public à propos de la chanson Les filles de 73, il laisse la salle reprendre en chœur le refrain de La vipère du Gabon.
Le tour de chant est jalonné de petites trouvailles inventives et poétiques : sur l’écran du cinéma de papa, on retrouve le décor de Jacques Tati, on voit avec mélancolie Antoine Doisnel, on entend la voix sensuelle de Fanny Ardant et celle si reconnaissable d’Alain Souchon, on écoute un monologue shakespearien drolatique, on revit son enfance avec les coupures publicitaires d’antan.
Les trois musiciens pleins de talent sont au diapason du chanteur. Frédéric Kret au violoncelle, Nicolas Mathuriau à la batterie et François Lasserre à la guitare, évoluent aussi aisément du piano classique au piano bastringue en passant par le clavier électrique.
Même si on peut regretter le procédé un brin récurrent de la succession de tableaux dans l’écriture des textes et les orchestrations, au demeurant très belles, qui couvrent parfois la voix de Vincent Delerm, on reste infiniment sensible à la facture classique de ces chansons (Delerm a travaillé avec Peter von Poehl, Ibrahim Malouf et Albin de la Simone) qui restituent avec tendresse et nostalgie, entre sourire et mélancolie, la petite musique du passé disparu, celle des "années soixante-dix/ dans le visage de Dewaere".
Jeudi 05 novembre 2009