Les artistes d'Une Semaine enchantée (Photo Saumur-Kiosque)
Du 10 au 18 septembre 2011, la troisième édition d’Une Semaine enchantée, s’est tenue à l’abbaye d’Asnières, sur la commune de Cizay-la-Madeleine. Cette exposition des œuvres de quatorze artistes résidant en Saumurois a permis à ceux-ci de raconter l’abbaye, son histoire, son environnement, à travers des formes d’expression variées.
Le visiteur était accueilli aux abords de l’abbaye par des personnages géants, issus des livres de son enfance, créés par l’illustrateur Olivier Supiot. Le sculpteur Daniel Collette, pour sa part, a écouté le chant des Sirènes en démultipliant leurs fines silhouettes à l’intérieur et à l’extérieur du lieu.
Autour du pigeonnier désaffecté, la plasticienne Mathilde Grolleau a déposé ses pigeons en céramique, raku et tissu léger, tandis qu'Anne Le Vilain, plasticienne elle aussi, recréait une spirale légère vers les hauteurs de la fuye.
Avec Sophie Puls et Sophie Touret, sculpteur-plasticienne et illustratrice, le visiteur pénétrait dans la sacristie et dans l’histoire de l’abbaye, réinventée par leurs soins. Le photographe Jean-Baptiste Rabouan s’est interrogé sur les fins dernières avec un tapis photographique à même les dalles, quand l’infographiste Sandrine Rabouan proposait dès l’entrée une mosaïque composée de calvaires démultiplié à l’infini. La peinture y a aussi trouvé sa place avec le Christ crucifié de Max Le Baleur et ses stations du Chemin de croix ; Hervé Girardin a fait quant à lui réfléchir sur la vanité de la création tandis que le peintre-graphiste Dem Chamanie nous a conté les heurs et malheurs de l’abbaye à travers un film d’animation.
En ce qui me concerne, deux créations ont particulièrement retenu mon attention. Ainsi, j’ai beaucoup aimé les deux immenses retables, conçus par le peintre-illustrateur Nicolas Jolivot, racontant l’histoire mythique de Tristan et Yseut. Finesses du trait, souci du détail, unité de couleurs, ont contribué à créer deux panneaux d’une inspiration médiévale particulièrement réussie. Installés de part et d’autre du maître-autel, ces triptyques nous ont rappelé l’importance capitale de cette œuvre, qui a influencé pour longtemps la conception de l’amour dans tout l’Occident.
Enfin, l’illustratrice Myriam Nion m’a une fois de plus émerveillée par la finesse et l’imagination subtile de son travail. Elle a (re)créé quatre jeux du Moyen Age, figurant des lieux et des personnages emblématiques de l’abbaye d’Asnières : le jeu du Pèlerin, de l'Herboriste, le jeu du Renard et des Poules, de l'Oie. Ces jeux, qui lui ont demandé soixante-dix heures de travail, ont été réalisés à l’encre de Chine sur papier. Des versions colorées et cirées permettent d’y jouer plus aisémément.
Un des exemplaires m’a fascinée : celui où l’artiste s’inspire du labyrinthe médiéval, que l’on appelait aussi Chemin de Jérusalem. Il s’agit d’un parcours initiatique dont on disait qu’il était réservé aux pèlerins dans l’impossibilité de faire réellement le pèlerinage dans la Ville sainte. Ce cheminement, que l’on retrouve sur le dallage de nombre d’églises, était fait généralement à genoux dans le but d’atteindre le centre du labyrinthe, appelé « Saut de la Joie ». Le plus connu de ces parcours de prière et de méditation est celui de la cathédrale de Chartres, dont un des autres noms est la « Lieu » : l’on pouvait l’accomplir en une heure, temps nécessaire pour parcourir une lieue.
Miriam Nion présentait encore un jeu de l’Oie, un passe-temps pour enfants, qui est tout sauf anodin. En effet, avec ses embûches, ses pénalités, ses retours en arrière, ce jeu est rien moins qu’un moyen pour faire l’apprentissage de la vie.
Chaque artiste a donc investi ce magnifique endroit avec sa propre sensibilité. Il faut dire que le lieu est superbe. Située entre Saumur et Doué-la-Fontaine, implantée au creux du vallon du ruisseau de la Gravelle, cette abbaye fut fondée par Bernard d’Abbeville, un contemporain de Robert d’Arbrissel, le fondateur de Fontevraud.
De la première église du début du XIIe siècle ne subsiste plus que le mur nord de la nef, construit en moellons et percé de petites fenêtres. A l’intérieur, le croisillon sud du transept et sa chapelle absidiole, dédiée à saint Etienne, en forme de demi-lune, sont les éléments les plus anciens. Dans le chœur rectangulaire de la nef de la seconde moitié du XIIe, on peut admirer un voûtement typique de l’art gothique angevin. Il est constitué de huit voûtes portées par deux colonnes en calcaire gréseux de huit mètres de hauteur, d’où s’élancent les fines nervures de la grande voûte centrale et des quatre voûtes bombée latérales.
Les clés de voûtes polychromes présentent un décor sculpté et peint du XIIIe siècle qui représente des scènes bibliques. Devant le maître-autel, on remarque une rosace en carrelage vernissé, tout à fait exceptionnelle.
Des fouilles de 1903 ont permis de mettre à jour les tombes des donateurs, Giraut II Berlay et son épouse Adèle. Les vitraux, provenant de l’atelier Chappée du Mans, ont été posés entre 1902 et 1950.
Et, pendant une semaine, dans ce lieu empreint d’une haute spiritualité, quatorze artistes nous ont donné à rêver en renouant avec un passé fait de mythes et de légendes.
Photos : ex-libris.over-blog.com, Dimanche 10 septembre 2011
Sources :
Abbaye d’Asnières et son association