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27 février 2011 7 27 /02 /février /2011 19:34

  Rossetti livre portrait

 

Je me suis récemment plongée dans un livre de Ash Russell (Editions Mengès, 1995) consacré à Dante Gabriel Rossetti. J’y ai retrouvé avec délectation les toiles de ce peintre et poète, que j'avais étudié il y a bien longtemps en Littérature comparée, et qui, avec six autres peintres, créa en 1848 la Confrérie préraphaélite, dont on retrouve la signature commune sur les tableaux : P. R. B. (Pre-Raphaelite Brotherhood).

Leur but est de redonner vie à l’art par un retour à la nature. S’ils admirent le peintre italien Raphaël, ils rejettent les conventions auxquelles son enseignement a donné naissance. Faisant du réalisme et de l’idéal leurs thèmes favoris, ils vont dépeindre les idées comme autant de symboles. Leurs thèmes de prédilection sont essentiellement bibliques, mythologiques et légendaires. La précision de leur art annonce parfois l’expressionnisme.

Parmi eux, on retiendra trois personnalités remarquables : William Holman Hunt (1827-1910), John Everett Millais (1829-1896) et Dante Gabriel Rossetti (1828-1882). Le frère de ce dernier, William, assuma les fonctions de secrétaire et de porte-parole du mouvement.

Au départ, tous suivent une orientation commune, imitant strictement les sources de l’art italien et des nazaréens.  Comme eux, Rossetti traitent des thèmes religieux, L’Adolescence de la Vierge Marie, Ecce Ancilla Domini (devenue par la suite L’Annonciation). Accusé avec ses pairs de blasphème, de papisme, de perversité, Rossetti s’oriente de manière personnelle vers des sujets d’inspiration médiévale traités à l’aquarelle (Mort d’Arthur, Dante). Alors que Millais (Ophélie) et Hunt (Le Berger stipendié) réussissent dans le naturalisme, Rossetti échoue dans cette voie, renonçant même à achever un sujet moral moderne (Trouvée, 1854).

Les opposants à la Royal Academy ne désarmant pas, les peintres font alors appel au célèbre critique d’art Ruskin, initiateur du mouvement pictural néogothique, qui accorde son soutien à Millais et à Rossetti. Le mouvement préraphaélite mourra de lui-même, quand ses créateurs suivront des voies divergentes. Rossetti pour sa part se retire dans un splendide isolement pour se consacrer à l’imagination pure et à une inspiration médiévale. L’art médiéval est alors considéré comme un modèle de liberté artistique par une Angleterre corsetée dans son puritanisme.

C’est en effet avec les thèmes médiévaux, purs produits d’une mythologie personnelle, et traités sur de petites dimensions, que Rossetti a le plus d’affinités. Miniatures aquarellées, couleurs héraldiques, atmosphère mystique, deviennent les caractéristiques  reconnaissables entre toutes de sa manière de peindre. C’est à cette époque qu’il réalise des dessins d’Elizabeth Siddal, dite Lizzie, son modèle, son élève, sa femme et sa muse. A la fin des années 1850, le peintre revient à la peinture à l’huile et puise son inspiration dans la voluptueuse chevelure rousse de la femme aimée. On le salue alors comme le pape du préraphaélisme.

Frère de la poétesse Christina Rossetti, fils d’un père qui était poète, Dante Gabriel a toujours écrit en même temps qu’il peignait. A l’automne de 1848, il termine la traduction en anglais de la Vita Nuova de Dante Aligheri. Au moment de sa rencontre avec Hunt, il est l’auteur d’un poème intitulé « La Demoiselle élue », écrit dans le style de Keats.  En 1862, quand Elizabeth Siddal meurt d’une overdose de laudanum, il enterre avec elle les poèmes qu’il n’est pas parvenu à faire publier. Il réalise une de ses plus belles toiles, Beata Beatrix (1872), faisant revivre la Béatrice de Dante sous les traits de son amour disparu. Ce n’est qu’en 1871 qu’il décidera de déterrer ses poèmes et de les faire publier. Ils susciteront le scandale par leur érotisme et leur sensualité.

Artiste excellemment doué qui vécut dans sa tour d’ivoire, peintre « littéraire » encensé et controversé, grand amoureux des femmes (Elizabeth Siddal, Fanny Cornforth, Janey Morris) qu’il sublima dans sa peinture, Dante Gabriel Rossetti influença durablement le mouvement symboliste et l’Art Nouveau par sa force d’expression et sa richesse d’imagination.

Les tableaux de Rossetti sont souvent accompagnés de poèmes que je donnerai à lire ces jours prochains.

 

  elizabeth siddal

Portrait d'Elizabeth Siddal, Rossetti

 

 

 

 

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commentaires

D
<br /> Merçi Catherine pour ton article et quel beau visage !. À bientôt ,<br /> <br /> <br />
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C
<br /> <br /> Toi qui as vécu en Angleterre et qui peins, je pense que tu aimes Rossetti.<br /> <br /> <br /> <br />

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