Paul Tellier (Kad Merad), Isabelle Tellier (Isabelle Renauld), Lise Tellier (Mélanie Laurent)
Jeudi 28 novembre 2013, sur France 3, j’ai regardé le film Je vais bien, ne t’en fais pas, réalisé par Philippe Lioret (2006). Ce long métrage est adapté du roman éponyme d’Olivier Adam qui a co-scénarisé le film.
C’est l’histoire d’Elise Tellier, dite Lili, (Mélanie Laurent) qui, au retour de vacances à Barcelone, apprend par ses parents la disparition de son frère jumeau, Loïc. Son père, Paul Tellier (Kad Merad), et sa mère Isabelle (Isabelle Renauld) sont avares d’explications, lui indiquant seulement que son frère a quitté la maison avec sa guitare à la suite d’une altercation avec son père qui lui reprochait de ne pas ranger sa chambre. Ce motif semble bien futile à sa sœur qui n’est guère convaincue et ne comprend pas que ses parents ne soient pas plus actifs dans la recherche du disparu. On lui allègue qu’il a dix-huit ans et qu’il a sans doute voulu fuir une atmosphère familiale pesante et étriquée.
Le temps passe, l’hiver vient. Elise sombre doucement dans la mélancolie, la neurasthénie et finit par arrêter ses études. Elle devient caissière dans le Shoppi où travaille son amie Léa (Aïssa Maïga) qui étudie à Sciences Po. Sa dépression empire, elle est en proie à une grave anorexie et finit par être hospitalisée, dans un centre psychiatrique où elle est isolée de sa famille. Léa et son compagnon Thomas (Julien Boisselier) tentent une sorte d’enlèvement pour la sortir de là mais leur entreprise échoue. Une première carte postale du frère disparu ramène l’espoir chez Elise et ravive son goût de vivre.
La jeune fille reprend alors pied dans la vie quotidienne, tout en demeurant dans le souvenir obsédant de son frère qui lui envoie régulièrement des cartes postales des villes où il s’arrête. Il y décrit sa satisfaction d’avoir quitté la maison familiale, en ne manquant jamais de critiquer la petitesse d’esprit de son père et son manque d’ambition. Elise demeure pourtant entre parenthèses, menant une vie routinière et s’interdisant de répondre à l’amour de Thomas qui s’est épris d’elle, tandis que Léa part à l’étranger.
On ne dévoilera pas la fin (surprenante et assez invraisemblable, seul bémol selon moi) de ce film sensible qui dit de manière très juste les relations conflictuelles entre parents et enfants et le difficile passage à l’âge adulte. Kad Merad, tout en retenue et en intériorité, interprète avec beaucoup de délicatesse le rôle du père ; Isabelle Renauld, quant à elle, montre de manière nuancée combien son personnage est déchiré entre son amour pour son mari et son attachement à ses enfants.
Au fil d’une année – le film est ponctué par les dates qui marquent l’évolution de la douleur d’Elise – dans un décor banalement coquet de petites maisons de banlieue, on suit le parcours attachant de cette jeune fille sensible qui ne se résout pas à la perte de son frère. L’actrice Mélanie Laurent reconnaît la force de cette histoire simple : « Jamais un scénario ne m’avait bouleversée à ce point » explique-t-elle. Elle, qui est encore très jeune, a accepté tout de suite ce rôle qui lui donnait la possibilité de jouer « pour la dernière fois un rôle de jeune fille ». Philippe Lioret, quant à lui, a été fasciné par « la petite flamme qui brille en elle ».
Dans le livre d’Olivier Adam, Philippe Lioret explique par ailleurs avoir trouvé « matière à quelque chose d’humain, et aussi la possibilité de mettre en scène des personnages qui pourraient être nos parents, nos frères, nos sœurs… ». Il a été sensible à la description des « sentiments extraordinaires des gens simples » et surtout à la « difficulté à se dire qu’on s’aime par pudeur, timidité, manque de générosité ».
Rythmé par la chanson phare de U-Turn (« Lili » dans le film), qui joue le rôle de testament fraternel pour Elise, ce long métrage tout en sobriété et au suspense bien ménagé, est le beau portrait d’une fille sensible et d’un père aimant. Et, par les temps qui courent, c’est assez rare pour être signalé.
Sources : Allo-Ciné