Un blog pour lire, pour écrire, pour découvrir et s'étonner. "La Vie a plus de talent que nous" disait Nabokov.
Par Catheau
Mère de douleur, Picasso, 1959
Cet après-midi, relisant le recueil de quatrains, Enfin le royaume (2018), de François Cheng, je suis de nouveau impressionnée par son immense compassion pour l’Autre. En cette époque de violence extrême, je reproduis ici plusieurs de ses quatrains inspirés.
Page 86, ce quatrain me fait penser à Victorine Dartois et aux victimes des récents attentats islamistes :
Violettes violées,
Rouge-gorge égorgé,
Nuit serait partage,
Si cauchemar n’est.
Page 95, c’est un quatrain dédié à une écrivaine et sinologue française qui s’est suicidée en 2007, à l’âge de 36 ans :
A Lisa Bresner
La terrible vie terrestre n’est point pour toi.
Ton amour trop vaste pour qu’on pût t’aimer ;
Ton rêve trop haut pour qu’on te suivît. Par la fenêtre,
En un seul cri, tu rejoignis l’ange, ton propre être.
Page 98, le quatrain est écrit à la mémoire d’Estelle Mouzin :
A Estelle que nous n’oublions pas
et à toutes les autres
Le gouffre où la bête a broyé ton innocence,
Il est en nous. Jusqu’au bout nous te chercherons.
Pour toi, nous gardons ce qui nous reste de tendresse,
Et nous veillons à ce que rien ne nous apaise.
Page 127, le poète nous exhorte à faire face :
Tenir bon. Jusqu’à l’écœurement,
Jusqu’au retournement, chair broyée,
Os rompus, chute dans le Rien, seul à même
De réinventer le Tout. Tenir bon.
Et page 148, une forme d’espoir, en dépit de tout :
Tu te souviens des noms ; tu entends
Le tien. Quelqu’un doit se souvenir
De tout. D’outre-ciel une voix pérenne
Tisse la toile à n’en plus finir.
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