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Un blog pour lire, pour écrire, pour découvrir et s'étonner. "La Vie a plus de talent que nous" disait Nabokov.

Jardin de cloître.

C’est un printemps de confinement

Mais le jardin ne le sait pas

Tous les ans c’est pour lui la même renaissance

Entre ses murs de tuffeau blanc

Et son chêne verdi envahissant le ciel

Dans ce jardin reclus je marche chaque jour

Tel le prisonnier dans sa cour enfermé

Ignorant du futur  qui ne sait si un jour

Il reverra l’été

 

Mes pas continués ont formé un sentier

Sur le gazon touffu aux herbes écrasées

Des moucherons folâtres

En vibrants bataillons une escorte me font

 

Des lézards affairés en  petits crocodiles

Sous mes pieds fatigués en flèche se défilent

 

Un grossier bourdon bleu violemment me frôle

De son corps velouté de matou en goguette

 

Sur le  buisson de photinia aux fleurs en chou-fleur

Les carabes brillants sont des bijoux glacés

Dans l’ombre des palmiers croissent des grappes jaunes

Et mille raisins noirs

Ils forment un duo dans cette solitude

Puisque l’un est un mâle et l’autre une femelle

 

Les fruits du magnolia ont chu

Pommes de pin noircies accoucheuses de graines

Et l’on attend la fleur dans sa blancheur musquée

Qui s’enorgueillira en calice dressé

Emergeant de leur conque

Les roses en leur pâleur  se déplient se déploient

Fragile transparence prête à se déchirer

Sous le laurier en feuille aux promesses d’étoile

Sur les losanges verts du treillis régulier

Le jasmin rosâtre tente en vain l'escalade

Jusqu’aux ardoises grises offertes à la brise

Dans le petit chemin bordé de noisetiers

Tout blanc du seringa lilial

Ombragé par les fleurs de l’odorant lilas

Je respire en vertige les senteurs fleuries

Et les larmes perdues de la glycine mauve

Par-delà le mur beige aux chiffres à l’envers

Distraction du maçon

Je devine curieuse la voix de ma voisine

Enfermée dans son âge et ses infirmités

Qui parle à ses enfants en un bruit de sourdine

Parfois un bêlement dans le champ d’à côté

Me fait me souvenir du doux agneau pascal

Et le grincement vif d’une scie électrique

Se veut annonciateur des bûches de l’hiver

Dans ce jardin de cloître où recluse je rêve

L’hirondelle émigrée a retrouvé son nid

Ses folles arabesques vers le soir s’envolent

M’entraînant avec elle en une valse folle

 

Dans ce temps suspendu  où je suis comme un moine

Le jardin me console de l’immobilité

La cloche de l’église bat ma tempe pensive

La tourterelle grise sur le toit me fait signe

Les aboiements d’un chien m’aspirent au dehors

 

Au jardin des reclus

La vie se continue

 

Photos : ex-libris.over-blog.com

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M
Quel bonheur qu'un jardin comme le vôtre. J'y retrouve des sensations cousines des miennes.<br /> Merci Catheau
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C
Oui, toutes deux aimons y déambuler et le célébrer.
E
Re bonjour Cathy , oui les accès aux plages sont interdits ! . Hier un jogger s'est fait verbaliser sur la plage mais pas " J" loll !! . De beaux clichés de votre jardin qui doit être bien reposant loin des des restrictions . Bonne nouvelle semaine bien au calme . Je vous embrasse ,
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E
Coucou Cathy , oui votre jardin respire la tranquillité et vous procure un bien être assuré . Bonne méditation pendant le confinement et fin de semaine à toi et à Alain , je vous embrasse ,
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C
Je pense à vous, devant la mer, mais à qui la plage est interdite. Bon courage !
M
La vie est plus forte que toute pandémie, il suffit d'une zone protégée, d'eau et de lumière et elle surprend, et elle domine, et elle foisonne. Vous avez beaucoup de chance de pouvoir goûter à ce bonheur, et de le transcrire avec talent!
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C
Oui, en ce temps difficile, avoir un jardin est un privilège dont je suis consciente. J'espère que votre réclusion parisienne se passe au mieux.
S
Quelle belle promenade poétique en votre domaine! Vos influences sont à portée de vos sens tandis que votre plume signe votre style encré de délicatesse.
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C
En ce temps de confinement, c'est un privilège d'avoir un jardin où déambuler. Et en avril, il embaume !